Je veux en finir

[Maarie03]

Voilà, j'ai énormément hésité avant de parler de ce qui me tracasse depuis des années parce que j'ai très peur du jugement des autres, et parce que je ne fais pas vraiment confiance aux psychologues et psychiatres mais bon, je n'ai plus grand chose à perdre.

J'ai seize ans, je suis en Terminale. Je suis d'apparence quelqu'un d'assez maladroite, qui aime les plaisanteries. Mais ma seule volonté désormais est de quitter ce monde. Vous allez me dire que c'est trop jeune, que c'est n'importe quoi, que j'ai toute ma vie devant moi, mais moi, j'estime avoir passé suffisamment de temps ici, parce que je ne souhaite pas continuer de vivre plus longtemps.

En fait, depuis un peu avant l'âge de 10 ans, j'ai commencé à entrer dans un cercle vicieux. Je me dévalorise constamment, je me dit que je suis nulle, que je ne sers à rien du tout, que les gens ne m'aiment pas, que de toute façon personne ne tient à moi, que je suis un monstre, et que mes bonnes notes à l'école ne tiennent que de la chance ou de malentendus. Pourtant voilà, je suis une bonne élève même encore aujourd'hui, je postule pour Science Po Paris, et j'ai en général d'excellente appréciations, alors personne, moi y comprit, ne comprend pourquoi une telle dévalorisation. Le problème c'est que c'en est allé à un point où je me dévalorise dans tout ce que je fais, les habituels "t'es qu'une merde, arrête tout, tu n'y arriveras jamais, de toute façon personne ne t'aime et tout le monde se fout de toi, tu n'auras jamais tes concours, regarde comme t'es nulle" reviennent souvent. Et j'ai développé un énorme complexe d'infériorité envers ma meilleure amie, elle qui a toujours les meilleures notes, elle qui est plutôt populaire, elle qui est jolie, elle qui a des passions intéressantes. Moi je suis la mauvaise, la paria, l'étrange, la moche avec un gros nez, une fille bizarre qui aime les mangas, et l'écriture, l'inintéressante. Ça va jusque dans des dimensions complètement idiotes. Alors mes idées noires prennent souvent le dessus, je me met à être agressive envers tous, à me frapper. Parfois je me casse des os, je me mords jusqu'au sang. Et après avoir fait ça, je me déteste encore plus, je me dit que je ne vaux rien, rien de plus qu'une merde de chien dans la rue. Et lors de mes moments de colère, de haine face aux autres mais surtout à moi même, je deviens dangereuse, je casse tout autour de moi, je me fais mal, et je fais du mal au autres. Ça me conforte encore plus dans l'idée que je suis faible, que je mérite de mourir. J'en ai marre de souffrir et de faire souffrir les autres. Je ne trouve aucun sens à ma pathétique vie.

Au lycée je suis tout sauf populaire, ou du moins, appréciée. La popularité je m'en fiche pas mal, nous ne sommes pas dans une série, mais je suis souvent à l'écart, et j'ai trop peur des autres. J'ai peur qu'ils me jugent alors je les évite. C'est peut être bon à savoir, mais j'ai vécu une forme de harcèlement en primaire, en 5e et en 1ère, ça doit venir de là.

Enfin, j'ai l'impression que mes parents, et mes amis me lâchent. Ma mère préfère faire des câlins à ma petite sœur, mon père préfére jouer avec elle. Mes amis se fichent un peu de moi, même quand je suis sérieuse. Ça doit être à cause de mes idées noires, les gens ne veulent plus de moi. Où c'est encore une idée que j'invente...

Et de tout ça, je n'en parle pas, je n'en ai jamais parlé à personne, pas à mes parents qui, eux, ne se doutent pas du fait que j'ai déjà tenté par trois fois un suicide aux médicaments. Je ne pourrais jamais leur en parler, il se moqueront de moi comme ils le font quand ils sont énervés (pourtant en temps normal je les adore mais je sais que je ne peux pas parler). Je ne peux pas en parler à ma meilleure amie ni à mes autres amies, elles me lâcheront. Ma sœur est trop jeune pour comprendre elle a neuf ans. Et je n'ai pas vraiment confiance en un psy, j'ai trop peur de passer pour une folle et de toute façon ma mère refuse que j'aille en voir un, et je n'aurais pas assez d'argent pour payer une consultation. En plus, peut être que ce que je ressens depuis des années c'est ce que traverse tout ado, alors je ne pense pas avoir la légitimité de me plaindre de tout ça. Encore quelque chose qui me dévalorise...

J'avais vu une psy quand j'avais 8 ans après ma première tentative, mais je ne me rappelle plus trop des effets des consultations sur moi. Mais je sais que je ne veux pas y retourner, encore à 8 ans, on se prend au jeu avec une dame sympa, mais à 16 ans c'est tout autre chose. Je refuse de parler de tout ces problèmes à quelqu'un que je ne connais pas et qui peut les répéter ensuite, en collant mon nom dessus. Ici, en anonyme, c'est mieux. Ça nous conforte dans un pseudo-sentiment de sécurité.

En conclusion, la seule pensée qui m'anime en ce moment et depuis quelques années c'est : Meurs sale monstre ! Le monde ne s'en portera que mieux ! Tu ne sers à rien de toute façon !

Voilà, il n'y a pas vraiment tout, c'est un peu trop complexe pour moi, mais il y a l'essentiel. Je ne sais pas si c'est grave, mais j'avais vraiment besoin de vider mon sac. Une lueur de raison qui reste en moi, l'envie de se débarrasser de la chose qui me fait mal, avant de faire ce qui pourrait être une grosse bêtise. Désolée pour le texte un peu long et désolée pour ma négativité...

[Tristana—]

Je ne sais pas si je fais bien de répondre.
Parce que se rendre complice d’une personne voulant « en finir » n’est pas forcément une bonne idée, surtout sur un forum PSY.

On sera deux à avoir l’esprit de contradiction.

Vous deviez vous relire. Et l’anonymat ne permet pas tout.

Vous êtes trop vague dans vos propos. Vous décrivez votre mal-être mais rien des causes l’ayant engendré. Et au vu de ce que vous dites, vous me paraissez quelqu’un de suffisamment réfléchi pour faire votre auto analyse.

Vous dites par exemple qu’une de vos amies a « pleins de passions ». Qu’est-ce qui vous empêche d’en avoir ?

Concernant les complexes, c’est commun à la plupart d’entre nous. Vous avez un « gros nez ».
J’ai une poitrine digne d’une fillette de 11 ans.

On peut toujours trouver des moyens d’y pallier si nos gênes physiques prennent trop de place.

Et pourquoi ne pas mettre en valeur ses atouts ?

Vous parlez de Sciences Po. C’est une excellente école. Vous êtes probablement intellectuellement intéressante.
Et si vous montrer à vos pairs votre face sombre, ils ne seront pas attirés vers vous.
Le positif attire le positif. Et votre négativité s’auto alimente.

Cordialement

[Maarie03]

Bonsoir, (et merci beaucoup d'avoir répondu)

Si je connaissais les causes de ce mal être je n'en serais peut être pas là, mais je ne saisis pas bien ce que vous voulez dire par "causes". À vrai dire je n'en ai aucune idée. Mais je peux vous donner peut être quelques pistes:

J'ai subi des formes de harcèlement en primaire, en 5e et en 1ère, principalement sous forme de moqueries répétées en primaire, d'humiliation en 5e et de menaces de mort en 1ère. Et quand mes parents s'énervent, ils aiment bien choisir délibérément les mots qui me touchent le plus pour me faire réagir, en général des "vivement que tu partes de la maison, tu n'arriveras jamais à rien". Pour le reste je ne sais pas trop. J'ai eu une vie plutôt banale, dans une bonne famille bien rangée.

Pour l'auto analyse, effectivement, j'ai réussi à mettre un mot sur le complexe d'infériorité il y a peu, mais pas sur le reste. Je ne sais pas pourquoi je pense toutes ces choses, ni comment c'est arrivé, mais ce mal être m'accompagne depuis bien trop de temps pour que je me souvienne comment il est arrivé. Je sais que c'est arrivé vers l'âge de 8 ans parce que c'est là que j'ai commencé à voir un psychologue mais je ne me souviens pas de grand chose de cette époque là. Fraîchement débarquée de la campagne, je vivais en ville, j'avais quelques amies, une maîtresse sympa qui me poussait en avant, de quoi être parfaitement heureuse. Et pourtant il y a quelque chose qui a couaqué.

Je suis incapable de mettre mes atouts en valeur, je ne sais pas pourquoi, peut être à cause de la peur. C'est peut être la raison pour laquelle je n'arrive pas non plus à mettre mes passions en avant (je ne parlerais pas de véritables "passions" mais de centres d'intérêts plutôt). Et cette face sombre est perpétuelle et incontrôlable, ce doit être ça qui repousse les autres, malgré mes efforts pour me contenir en société et présence de ceux que j'aime. Comme vous dites, la négativité s'auto alimente. Et en plus de la négativité, il y a aussi cette haine envers moi même qui me pousse à me briser les doigts contre un mur le plus souvent. Cette colère, elle, je le sais, est plus ancienne que la dévalorisation, mais là encore je ne sais pas d'où ça vient.

J'ai déjà tenté des trucs par le passé, comme parler à mon chat pour me libérer des émotions négatives, tenir un journal intime, méditer, respirer, rire, passer du temps avec ma sœur, mais rien n'a marché et ça continue d'aller crescendo.

J'en ai marre de lutter contre ça, ça peut paraître puéril, mais les idées noires sont presque toujours les plus fortes, j'aimerais vraiment que ça s'arrête, j'aimerais être une ado normale, et plus cette chose qui se morfond dans son lit à attendre que ça passe. Mais plus le temps passe, plus je baisse les bras. Je n'en "finirai" pas aujourd'hui, peut être pas non plus demain, mais j'y pense chaque jour et plus le temps passe, plus ça me semble être la meilleure option. J'ai l'impression d'être folle.

Désolée encore si je n'ai pas bien répondu à tout ainsi que pour la négativité ça doit être pénible pour vous...

[Tristana—]

Effectivement, votre harcèlement a sûrement joué un rôle dans vôtre mal-être. On est beaucoup à l’avoir subi . Et je ne dis aucunement cela pour le minimiser.

Une légère différence suffit pour être bouc émissaire. Elle peut être physique, psychologique ou intellectuelle.
Votre langage non verbal repousse peut-être les autres. Il est aussi possible que vos centres d’intérêts soient différents de ceux de vos camarades.
Sortir du moule dérange, les gens se questionnent. On est très vite catalogué.

Quand je parle de trouver les causes de vôtre mal-être c’est pour pouvoir mettre des mots dessus, comme des pansements. Vous aurez une charge émotionnelle moins importante.

Cordialement