Gynéco : blocage psychologique gênant

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Castegir
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Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Castegir »

Bonjour,

Mon post est un peu particulier mais j'ai, je crois, besoin de quelques conseils.

Je commence par raconter mon histoire.
J'ai toujours redouté et repoussé au maximum le suivi gynéco. Ayant subi des attouchements hebdomadaires pendant une année scolaire, j'avais tendance à fuir les garçons/hommes et à avoir un profond dégoût pour tout ce qui était sexuel. Je n'avais par ailleurs pas de problèmes physiques nécessitants un examen gynéco donc je me réfugiais derrière ces deux points pour me convaincre que je n'avais rien à faire dans un cabinet gynéco.
Il y a 2 ans, j'ai rencontré un jeune homme différent à qui j'ai rapidement fait confiance (un peu trop rapidement...) et j'ai eu mes premières expériences sexuelles. Mauvaises expériences. Phobique des caresses, dégoûtée par le sexe, j'avais besoin de temps, de tendresse et d'une parole rassurante. J'ai eu tout le contraire ; une première fois lors de notre deuxième soirée en tête à tête, après avoir lui avoir dit et répétée que je ne voulais pas, pas ce soir-là, après avoir eu, sous ses yeux, une grosse crise d'angoisse..., aucune tendresse, aucune parole rassurante (voire même carrément le contraire puisque j'ai eu droit à une multitude de reproches après l'acte : tu n'as pensé qu'à ton plaisir, la prochaine fois, si tu ne me suces pas, je te b**se à sec, tu dis que tu n'as pas aimé et que tu ne voulais pas mais tes non n'étaient pas très convaincants, tu n'avais qu'à m'en coller une... Je m'arrête là, la liste est longue).
Dans le même temps, je constatais que mes cycles étaient de plus en plus longs et irréguliers et je commençais à réellement m'inquiéter (mon médecin traitant ne semblait jamais inquiet quand je lui disais que j'avais des cycles de plusieurs mois alors j'avais toujours pensé que je me montais la tête pour rien et que la régularité n'était qu'une idée véhiculée).

C'est à ce moment-là que j'ai pris rdv pour la première fois rdv avec une gynécologue (une femme ... ma gêne avec les hommes aurait été trop difficile à gérer dans ce cadre-là).
Le premier rdv est arrivé. Je m'étais préparée mentalement à l'examen mais j'étais pourtant au bord des larmes dans la salle d'attente (angoisse principalement). Finalement, ce rdv a surtout été une première mise en contact (ce dont j'avais vraiment besoin). Elle m'a simplement créé un dossier avec les informations nécessaires. Après l'évocation de mes cycles beaucoup trop longs, elle a demandé à ce que j'aille faire 2 prises de sang à des moments différents pour voir s'il y avait une anomalie au niveau hormonal. Elle m'a demandé de revenir la voir avec les résultats. Lors de ce rdv, je suis donc restée derrière le bureau et j'ai seulement eu droit à la prise de tension.
Une fois les résultats de la prise de sang arrivés, je suis revenue la voir (après un long moment de préparation mentale cette fois encore car j'étais sûre de ne pas y échapper une deuxième fois). Certains résultats n'étaient pas vraiment dans les normes mais, apparemment, ce n'est pas forcément inquiétant dans l'immédiat puisque je veux attendre quelques années avant d'avoir des enfants. Suite à cette discussion, elle m'a juste annoncée qu'elle allait me palper les seins pour voir si tout était normal. Ce n'était pas de gaieté de coeur que je la suivais dans la pièce voisine mais elle a fait en sorte de me changer les idées et m'a juste demandé de soulever mon t-shirt et de dégrafer mon soutien-gorge (ce qui pour moi était moins traumatisant que de me déshabiller finalement ... ce qui en soit ne change rien, j'en ai bien conscience, mais psychologiquement, c'est plus facile à accepter).

Il y a deux mois, j'allais à mon 3ème rdv gynéco pour un debriefing suite à une échographie pelvienne. Cette fois-ci, j'y suis allée plus détendue ; elle m'avait annoncé un debriefing, ça me convenait. Nous avons commencé par discuter et elle m'a demandé de passer dans la salle à côté pour qu'elle m'examine. Le moment crucial était arrivé ; j'ai senti mon estomac se nouer et ma respiration devenir beaucoup plus difficile mais je l'ai suivie dans la pièce voisine sans broncher. Je suis restée immobile, les yeux rivés sur ses mains qui fouillaient dans un tiroir en essayant de limiter toutes les pensées qui m'arrivaient d'un coup. Dans ce genre de situation stressante, je ne suis plus capable de penser "normalement" ; j'ai des centaines de pensées qui arrivent en même temps ce qui fait que mon cerveau n'est capable d'en traiter aucune. (C'est un peu comme si une nuée d'abeilles s'agitait autour de ma tête et que je devais retrouver la reine d'un simple coup d'oeil). Me sentant immobile dans son dos, elle m'a dit d'enlever le bas uniquement dans un premier temps. Je n'ai rien répondu et ai commencé à porter mes mains sur le bouton de mon pantalon mais impossible d'aller plus loin. Je sentais mon coeur battre très fort et je n'avais qu'une seule envie ; partir en courant. Elle s'est tournée vers moi et m'a répétée qu'il fallait que j'enlève au moins le bas pour qu'elle puisse m'examiner et, elle avait à peine fini sa phrase que je lui répondais "Non." Ma réponse l'a étonnée ; il y avait de quoi, j'étais moi-même surprise. Je suis plutôt du genre "docile" et agréable et cette réponse assez sèche ne me correspondait pas du tout. Elle a juste posé une main sur mon épaule et m'a dit qu'elle comprenait que j'ai peur mais qu'elle serait délicate et qu'elle arrêterait dès que je le lui demanderais. Je lui ai répondu que c'était vraiment trop compliqué pour moi et, face à mon refus, elle n'a pas insisté. Elle m'a demandé des explications malgré tout ; je lui ai expliqué que j'avais beaucoup de mal à accepter qu'on me touche. J'ai bien vu que son regard était très interrogateur mais je n'avais pas envie d'en dire plus (honte d'avoir traversé les deux moments de ma vie évoqués précédemment, honte d'être incapable de se faire examiner et culpabilité. Grande culpabilité : d'avoir laissé ces deux jeunes s'amuser avec mon corps pendant une année entière sans en parler à personne, sans crier et finalement, en n'essayant même plus de se débattre, d'avoir été incapable de me défendre avec mon "copain", d'être resté avec lui suite à ça et d'avoir subi plusieurs fois la même chose (j'ai conscience qu'il m'a manipulée en me rabaissant tellement que je n'avais plus aucune confiance en moi et que je pensais que sans lui, je ne serais plus rien, j'ai conscience aussi que si je culpabilise autant c'est parce qu'il m'y a beaucoup aidée avec ses reproches mais ça ne m'aide pas tant que ça), d'avoir été aussi sèche avec la gynéco qui était très douce.

Ce long message pour finalement arriver au but premier de ce message : je culpabilise énormément suite à ce rdv "avorté" et j'ai terriblement honte d'avoir refusé qu'elle me touche. Le problème ne vient vraiment pas d'elle ; c'est son métier et elle est très douce et agréable. J'ai toujours su que ce serait une épreuve difficile pour moi de par ma pudeur notamment et je me répète souvent que c'est sûrement une des rares personnes à totalement désexualiser la chose ce qui finalement en ferait un examen aussi banal qu'un examen de la gorge. Je suis d'ailleurs plus qu'en âge d'avoir un examen gynéco complet (je suis plus proche de l'âge théorique du premier frottis que de la majorité) mais ce léger incident m'a totalement refroidi. Je n'ose même plus reprendre rdv. Pour quoi faire d'ailleurs ... j'y étais il y a 2 mois et j'ai refusé qu'elle me touche. Un rdv maintenant me semble très rapproché du précédent et je ne sais pas ce que je pourrais lui dire en arrivant dans son bureau (d'autant plus que je ne peux pas dire avec certitude que je serai capable d'aller au bout de l'examen cette fois-ci ...). Je pensais en parler à ma mère ou à des amies proches pour avoir des conseils mais je serais obligée de raconter des moments de ma vie que personne ne connait et que je préfère garder pour moi... Je me tourne donc vers ce site sur lequel j'espère avoir des conseils.

Merci d'avance.
Dubreuil
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Dubreuil »

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PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
Dubreuil
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Dubreuil »

Il est évident que vous présentez un état de stress post-traumatique qu'il faudrait tout d'abord " soigner " avant de penser à subir un examen gynécologique classique.
voici tout d'abord quelques généralités sur " la peur " du gynécologue...

Cette peur là est archaïque. Elle remonte du fond des temps quand le corps de la femme n'était ( ? ) qu'une marchandise, un trou, un bout de viande, où l'homme en toute impunité pouvait fourrer dès sa pulsion, violer, jauger, reluquer, écarteler, disposer, y jouir, donner vie ou mort, etc…
Et c'est encore d'actualité de nos jours.
La femme, malgré tous les beaux discours des hommes, est " aussi " un objet sexuel. Quoi qu'on en dise, quoi que les hommes s'en défendent. C'est ainsi. C'est l'espèce, et la morphologie.
Il faut beaucoup de force de caractère, une grande confiance en soi, une belle enfance, le respect des parents dans le toucher déjà, aux premières heures de la vie, pour que notre corps ne devienne pas une souffrance parasite, ou séparé de nous, que nous le regardions comme " étranger ", pour l'autre, pour sa satisfaction.
Ou comme un moyen d'échange perverti.
Vous n’êtes pas la seule à ressentir cette terreur, beaucoup d'adolescentes, de jeunes femmes et de femmes vont chez le gynéco comme si elles aillaient « se faire violer ».
C'est redevenir un petit animal apeuré, affolé, à qui on va faire du mal, peut-être tuer. Quand on doit se montrer nue, plus que nue, devant le professionnel, on peut en effet se croire, et se ressentir, en extrême vulnérabilité, en proie au jugement, aux projections, à la bêtise, à la lubricité de l'autre.
Quand on est vivant, la seule chose censée nous appartenir, c'est notre corps. Et dès qu'une femme ressent de la terreur, de la peur, du dégoût, quand on lui dit qu'il " faut " qu'elle aille se faire manipuler, pénétrer par des doigts ou un instrument, c'est l'inceste qui remonte.
C'est le viol qui montre son visage hideux.
Alors au grand jamais, ne vous culpabilisez pas de cette terreur, de ce dégoût, de ces frayeurs.
Parce que, chez le gynécologue, ce n'est pas toujours la phobie qui est en scène, mais le fait même d'être une femme.
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Dubreuil
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Dubreuil »

ETAT DE STRESS POST TRAUMATIQUE APRES VIOLENCES, ABUS SEXUELS

Etat de stress post traumatique
http://www.sosfemmes.com/violences/viol ... exuels.htm
https://www.youtube.com/watch?v=dYAlWw8YnCU

Les troubles psychiques spécifiques liés aux traumatismes sont liés à des mécanismes de sauvegarde exceptionnels, psychologiques et neurobiologiques, déclenchés lors d'un stress extrême et du risque vital que génère le traumatisme. Ces mécanismes sont responsables d'une déconnection du circuit de réponse au stress entraînant une mémoire traumatique, une dissociation avec anesthésie affective et physique.
Par ex - Pour qu'une victime puisse vivre malgré cette insurmontable horreur, son inconscient va faire en sorte qu'elle ne se rappelle plus des deux ans de sa vie avant le drame, et deux ans après, afin qu'elle ne puisse faire aucun lien entre un souvenir anodin durant cette période, et la scène traumatique.

Angoisse réactionnelle
Difficulté d’anticipation se traduisant par la nécessité de ne plus réfléchir, cela risquant de lui rappeler l’impact émotionnel.
Troubles dissociatifs post traumatiques ( LHT )
Troubles de la mémoire et de la concentration
Sentiment d’être spectatrice de sa vie
Banalisation de son état de victime
Sentiment de vide
Troubles d’hyperactivation neurovégétative

Déni de reconnaissance
C'est la position de l'entourage, d'un médecin, de la famille, du tribunal, qui loin de prendre en compte le premier impact traumatique ( les photos en ligne ) l’entérine aujourd'hui coupable de se plaindre à nouveau de son agression ( camarades de classe, ancien petit ami ).

La répétition des chocs émotionnels ont comme « anesthésié » ses relations à autrui.
Distanciation des affects, froideur pathogène
Le fait que l’on ait pu une fois encore sans son accord se servir d’elle comme objet de jouissance sexuelle la distancie dramatiquement de ses affects.
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Dubreuil
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Dubreuil »

LA HONTE

Honte de soi, de son histoire, de son image, de ses origines ou, tout simplement de situations vécues, le sentiment de honte se vit, malheureusement, le plus souvent dans le silence. On s'en cache autant qu'on la cache. Pourtant, seule sa verbalisation permettrait de s'en défaire.
La honte est une émotion universelle qui possède sa propre physiologie et ses caractéristiques. Rougissement de la peau, regard baissé, nuque courbée, la honte se caractérise aussi par un sentiment d'indignité, des pensées d'infériorité et de dévalorisation. Elle est le sentiment ressenti lorsque nous, nos actes, notre identité, ne correspondent pas aux normes du groupe auquel nous appartenons, ou souhaiterions appartenir.
Emotion assassine, elle contribue à couper des autres, celui ou celle qui la ressent.
La honte peut, cependant, s’avérer être une émotion socialement utile, car elle, ou plutôt la volonté de l'éviter, nous pousserait à bien nous tenir dans le groupe, à en respecter les règles afin d'en être acceptés ou, tout simplement pouvoir y demeurer. La honte, selon des études menées, posséderait aussi quelques conséquences positives. En effet, des études ont révélé qu'elle rendrait notre interlocuteur plus indulgent et plus enclin à nous aider.
Il est essentiel, dans un premier temps, de savoir distinguer la honte de la pudeur et de la culpabilité. Si ces dernières, la pudeur et la culpabilité, ont, elles aussi, une utilité sociale, leurs conséquences, contrairement à la honte, ne menacent en rien l'intégrité de la personne. Comme l'écrit le psychiatre Tisseron dans son livre « Vérités et mensonges des émotions », « la pudeur protège, la culpabilité sociabilise, la honte désoriente. »
Lorsque le sentiment de honte est expérimenté, ce sont les trois piliers de l'identité, que sont l'estime de soi, l'affectivité et l'intégration dans le groupe, qui se retrouvent menacés.
L'estime de soi, car la honte se transforme en miroir déformant, au travers duquel la personne se perçoit, faisant d'elle une personne indigne d'amour. Une personne habitée par un sentiment d'être perpétuellement en faute. La honte tue toute chance de cultiver une bonne estime de soi. Elle l’entache un peu plus à chaque fois, pour finir par la faire disparaître.
La honte menace tout autant l'intégration sociale que l'affectivité, car ce sentiment provoque, non seulement une rupture avec l'environnement, mais surtout avec soi-même. Au cours de son développement, l'individu, bénéficiant d'un environnement aimant et sain, développe un partenaire privilégié intérieur, qui fonctionne à l'image d'une mère aimante et bienveillante. C'est ce partenaire intérieur qui permet à chacun d'établir ce que l'on nomme le « dialogue intérieur ». Ce dialogue intérieur nous permet le plus souvent de relativiser, d'analyser et de comprendre les expériences que nous vivons, mais aussi d'y faire face avec un certain aplomb. En résumé, c'est cette capacité au dialogue intérieur qui donne à chacun la sensation d'être maître de son monde. Or, la honte brise le contact avec ce qui sert de support à ses émotions, son partenaire intériorisé. ». Avec ce dialogue intérieur tranquillisant devenu impossible, la personne se retrouve privée de support intérieur et, par conséquent, de sécurité interne. Elle devient alors vulnérable, une proie facile pour toutes sortes d'abuseurs. Incapable d'entretenir un dialogue intérieur bienveillant, le sujet n'a d'autre choix que d'aller chercher cette consolation à l'extérieur, ou de se replier sur lui-même. Ainsi, dans des situations d'humiliation, le sujet voit son estime personnelle voler en éclats. Avec un dialogue intérieur apaisant rompu, il est enclin à donner le pouvoir à celui qui vient de le placer plus bas que terre, adoptant ses repères et ses croyances. On comprend pourquoi beaucoup de victimes d'abus finissent par croire qu'elles ne méritent pas mieux ! Car c'est ainsi que pensent leurs abuseurs !
La logique intellectuelle nous amènerait à penser que ces personnes n'ont aucune raison de ressentir de la honte, puisqu'elles ne sont pas à l'origine de l'abus subi. Pourtant, c'est bien ce sentiment de honte qui leur interdit, le plus souvent, de dénoncer l'abus ou même de se défendre. Dans son livre « La force des émotions », le psychiatre Christophe André avance des hypothèses formulées par des chercheurs en ce qui concerne cette honte ressentie par les victimes. L'individu intégrerait les notions d'autonomie et de contrôle comme faisant partie de sa dignité. Dans les situations d'abus, le sujet se voit privé de sa capacité de se défendre, de faire face à la situation, la honte s'installerait alors, car cette impuissance ressentie serait à l'encontre des valeurs de dignité humaine. Le sujet se retrouve honteux de n'avoir pas su se défendre !

« Formuler sa honte, c'est déjà la maîtriser ! », écrit le psychiatre André au sujet de la honte. Car si la honte désocialise, désoriente, il est essentiel de relancer le dialogue, de faire en sorte que la honte n'ait pas une chance de gagner la partie, en coupant l'individu de son environnement. Lorsque une honte est ressentie, il est essentiel de réinstaurer un dialogue avec l'extérieur pour pallier à la rupture de ce dialogue intérieur bienveillant.
En verbalisant l'émotion de notre passé, la honte cesse d'être un vestige morbide pour devenir un appel à la reconnaissance. Lorsque la honte se fait sentir, il est utile de choisir un interlocuteur neutre et bienveillant avec qui dialoguer ( un psy ) afin que ce dernier puisse offrir ce que la honte empêche : un regard accueillant et chaleureux sur son histoire, sur soi-même.
Car « la honte non dite accompagne le glissement vers une indignité toujours croissante, tandis que la honte revendiquée constitue le plus sûr rempart contre le risque d'envahissement. » (André)

Le sentiment de honte est pénible et angoissant à vivre, alors, il n'est pas rare que la honte se dissimule derrière d'autres manifestations, telle une immense ambition ou bien un ego survalorisé.
Il est aussi possible de projeter sa honte sur un tiers, à coup d'humiliation, ou sur un fait de notre histoire, sur un aspect de notre identité. Mais une chose est certaine, elle ne disparaît jamais, elle demeure tapie dans l'esprit et continuera de se manifester sous différentes formes.
Comme l'écrit le psychiatre Tisseron, « si les situations de honte peuvent facilement être oubliées, ses conséquences, elles, ne le sont jamais. Elles subsistent sous la forme de destruction et de fixations qui perturbent à jamais la vie psychique et relationnelle de celui qui en a été un jour marqué. » Ainsi en va-t-il de ce sentiment d'être perpétuellement en faute qui ne serait que la mise en scène de sa honte ressentie passée.
Il est donc primordial d'identifier la honte issue de traumatismes passés, d'accepter de la mettre à découvert en la partageant avec un interlocuteur de confiance et empathique, afin de s'offrir une chance d'en guérir. Car ce n'est pas la honte qui tue à petit feu, mais le silence auquel elle condamne.
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
Castegir
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Castegir »

Bonjour Madame,

Je commence par vous remercier pour vos réponses détaillées qui, je crois, me parlent beaucoup.
La femme, malgré tous les beaux discours des hommes, est " aussi " un objet sexuel. [...] Il faut beaucoup de force de caractère, une grande confiance en soi, une belle enfance, le respect des parents dans le toucher déjà, aux premières heures de la vie, pour que notre corps ne devienne pas une souffrance parasite, ou séparé de nous, que nous le regardions comme " étranger ", pour l'autre, pour sa satisfaction.
Ou comme un moyen d'échange perverti.
C'est exactement ce que je ressens en présence d'hommes (pas avec tous mais avec beaucoup) ; je ne me vois que comme un objet de plaisir. Les attouchements répétés et les rapports avec mon "copain" ont sûrement été déterminants dans cette vision-là.
Quant à mon corps, je crois que je ne le vois pas du tout comme un allié mais plutôt comme un "fardeau". Petit à petit, j''en suis arrivée à l'ignorer complètement et à me créer un système de défense très perfectionné. Je me coupe de tout ce que je peux ressentir et le cérébral prend le dessus sur tout le reste (ce qui est parfois épuisant puisque finalement, je suis tout le temps en train de penser, réfléchir, cogiter, même la nuit). Mon corps me fait quand même quelques signaux avec de bonnes douleurs chroniques mais rien de plus.
Quand on doit se montrer nue, plus que nue, devant le professionnel, on peut en effet se croire, et se ressentir, en extrême vulnérabilité, en proie au jugement, aux projections, à la bêtise, à la lubricité de l'autre.
Je n'aurais pas pu l'exprimer avec autant de justesse ... mais c'est bien ce ressenti qui m'accompagne. Tout cela est vrai avec le professionnel (ici, la gynéco) mais, je crois que c'est aussi ce que j'ai pu ressentir dans mes relations amoureuses (ce qui était un véritable obstacle à notre intimité).
Dans mon cas, ça fonctionne aussi avec la parole et le fait de se mettre à nu. J'ai peur de me dévoiler et je fuis toute conversation qui tourne autour de moi (ce que je ressens, ce que j'ai vécu en général, pourquoi je réagis de telle ou telle façon ...). Mais quand ça arrive, mon système de défense prend le dessus : je me réfugie derrière mon grand sourire habituel et mon cerveau reçoit des tas d'informations parasites d'un coup qui font que je suis incapable de répondre à la question qu'on vient de me poser car incapable de faire du tri dans tout ça ni d'avoir des éléments de réponse. C'est un peu comme si, inconsciemment, j'oubliais toute la partie de ma vie concernée par la question pour ne pas avoir à y répondre. Ce système de défense est très efficace mais devient assez handicapant. J'ai l'impression qu'il m'empêche d'avancer mais de ne pas réussir à le neutraliser (ce qui est dur à accepter pour quelqu'un qui est dans l'hyper-contrôle).
chez le gynécologue, ce n'est pas toujours la phobie qui est en scène, mais le fait même d'être une femme.
Être une femme... bien difficile pour moi. Je crois que j'ai eu beaucoup de mal à accepter tous les changements corporels liés à la puberté (acceptation qui n'a pas été facilitée par ces fameux attouchements). Je crois même que j'ai eu une période de rejet de la féminité (je me cachais comme je pouvais avec des vêtements trop larges, les pieds bien au chaud dans de grosses baskets en refusant tout ce qui pouvait me rendre un peu plus "féminine". Je cachais (et cache encore d'ailleurs...) mon hypersensibilité pour ne pas montrer la moindre faiblesse qui pourrait être jugée comme étant un trait féminin (ce qui en soit est assez ridicule ... j'en ai bien conscience).
Banalisation de son état de victime
Sentiment de vide
Troubles d’hyperactivation neurovégétative
Distanciation des affects
Banalisation des faits : totalement. J'avais fait la démarche d'aller jusqu'à un cabinet de psys, en espérant pouvoir avancer dans mon couple. J'ai fini par évoquer cette année d'attouchements mais j'ai tellement dédramatisé la chose que mon interlocutrice n'est jamais revenue sur ces faits. Je ne l'ai compris que lorsqu'elle m'en a parlé quelques séances après comme si c'était une simple chute de vélo alors qu'intérieurement, j'avais vécu ces séances hebdomadaires comme des "simulations" de viol, en me demandant à chaque fois jusqu'où ils iraient. J'ai d'ailleurs arrêté les séances (et je ne peux pas en vouloir à cette professionnelle à qui j'ai raconté ça de la même façon qu'un échec à un tournoi de pétanque).
Hyper activation neurovégétative (honnêtement, je ne savais pas vraiment ce qui se cachait derrière ce terme mais internet m'a quelque peu aidé) : hypervigilance - c'est un domaine dans lequel j'excelle (bien contre mon gré), colère - oui et non... je suis très dure avec moi-même et je peux éprouver de la colère mais uniquement envers moi-même mais c'est très rare que ce soit envers une autre personne. Ce qui d'ailleurs va avec ce sentiment de culpabilité qui ne me quitte pas ; je ne peux pas être en colère contre quelqu'un puisque je me sens toujours responsable de ce qui m'arrive, je cherche toujours où j'ai pu faire une erreur.
Distanciation des affects : je ne sais pas à vrai dire. C'est vrai que j'ai remarqué récemment que, dans des situations difficiles à encaisser, j'étais capable de ne "rien" ressentir (décès de proches, maladies graves...). Je mets ça sur le compte de mon côté "contrôle" ; je me coupe de mes émotions pour ne pas souffrir (ce qui pourrait être vrai puisque dès que je relâche un peu la pression, je peux avoir des moments de grande tristesse).

Quant à la honte ...
L'estime de soi, car la honte se transforme en miroir déformant, au travers duquel la personne se perçoit, faisant d'elle une personne indigne d'amour. Une personne habitée par un sentiment d'être perpétuellement en faute. La honte tue toute chance de cultiver une bonne estime de soi. Elle l’entache un peu plus à chaque fois, pour finir par la faire disparaître.
Estime de soi, confiance en soi, voilà des mots que je ne connais pas. Je me donne pourtant les moyens d'y arriver, ne serait-ce que professionnellement. Au niveau de mes études, j'ai travaillé d'arrache-pied pour être la meilleure sans chercher à écraser les autres (pour lesquels j'étais toujours disponible et prête à aider), je voulais juste pouvoir me dire que j'étais douée dans un domaine. Même en étant en tête de promo, je me disais que je pouvais faire mieux et que j'avais simplement eu de la chance. Je suis mal à l'aise quand on me complimente et je me dis sans cesse que ce n'était pas objectif (quand ça vient de mon entourage) ou que c'était un compliment intéressé (quand ça vient de mes collègues ou des personnes que je rencontre dans le cadre professionnel).
Il est donc primordial d'identifier la honte issue de traumatismes passés, d'accepter de la mettre à découvert en la partageant avec un interlocuteur de confiance et empathique, afin de s'offrir une chance d'en guérir. Car ce n'est pas la honte qui tue à petit feu, mais le silence auquel elle condamne.
Difficile mais une piste intéressante à travailler. Je garde donc précieusement ce conseil et vais faire en sorte de me débarrasser de la honte que j'ai pu ressentir et que je ressens toujours suite à mes expériences sexuelles.

Quant à votre message avec les 8 façons de se guérir, je vais en essayer d'avantage. J'en ai déjà expérimenté quelques-unes (yoga, écriture (vaguement... mais j'ai pu constater que le fait d'écrire, ne serait-ce que sur ce site, faisait quand même bouger les choses : mes nuits ont été animées par des cauchemars : examens gynéco forcés, viol ...), médiation - mais j'ai toujours l'impression d'être en échec dans ce dernier cas parce que je n'arrive pas à me concentrer uniquement sur moi-même, j'ai tendance à très vite divaguer. Je vais persévérer.

En tout cas, je vous remercie très sincèrement pour vos précieux conseils et vos paroles bienveillantes. Je ne comprenais pas pourquoi j'avais réagi ainsi avec ma gynéco et me sentais vraiment trop nulle de ne pas être capable de me laisser examiner par un professionnel. Votre premier message m'a déjà beaucoup apporté sur ce point et les autres me donnent des pistes pour avancer (rapidement je l'espère).
Merci.
Dubreuil
Psychologue clinicien
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Re: Gynéco : blocage psychologique gênant

Message par Dubreuil »

J'avais fait la démarche d'aller jusqu'à un cabinet de psys, en espérant pouvoir avancer dans mon couple. J'ai fini par évoquer cette année d'attouchements mais j'ai tellement dédramatisé la chose que mon interlocutrice n'est jamais revenue sur ces faits. Je ne l'ai compris que lorsqu'elle m'en a parlé quelques séances après comme si c'était une simple chute de vélo alors qu'intérieurement, j'avais vécu ces séances hebdomadaires comme des "simulations" de viol, en me demandant à chaque fois jusqu'où ils iraient. J'ai d'ailleurs arrêté les séances (et je ne peux pas en vouloir à cette professionnelle à qui j'ai raconté ça de la même façon qu'un échec à un tournoi de pétanque).
*** Vous n'avez pas eu à faire à une professionnelle, cette personne n'a suivi aucune formation thérapeutique, sinon le seul mot " attouchement " aurait été le point de départ de son discours, pour vous mettre en confiance ( et non dédramatiser ) afin que vous puissiez en parler.
Contrairement à un tribunal, chez un psy, ce n'est pas au patient de prouver la culpabilité de ses agresseurs. Ce n'est pas là que se situe son écoute.
Si vous souhaitez sortir de cet engrenage, optez pour l'hypnose humaniste ou l'EMDR.
Courage !
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
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