Un quart des femmes

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Brerafab
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Un quart des femmes

Message par Brerafab »

Bonjour,

Il y a bientôt 10 ans (en novembre 2012). J'ai avorté. Avorter est en réalité un bien grand mot...

J'avais 18 ans à l'époque, mon ex 23, il s'appelle A. . On s'aimait, enfin, peut-être que j'étais la seule à aimer. J'étais jeune et pudique, je ne voulais pas parler contraception avec ma mère, je ne voulais pas qu'elle puisse s'imaginer sa fille avoir des relations sexuelles. Un vendredi, alors que mes parents étaient partis pour un week-end prolongé, j'ai fais venir A. à la maison, je me sentais grande, comme une jeune femme qui reçoi chez-soi pour la première fois. Nous avons fais l'amour, et puis, une rupture de préservatif.

J'ai tout d'abord annoncé à A. ma séropositivité (je suis née avec le VIH et ai commencé ma prise en charge à 5 ans, lorsque ma mère, malade d'un crabe a été testée positive au SIDA), il a fuit. Comment lui en vouloir ? Je me sentais abandonnée une nouvelle fois bien sûr (mon frère est parti du jour au lendemain de la maison sans donner de nouvelles alors que j'avais 8 ans, lorsque j'avais 5 ans, ma mère est restée hospitalisée 1 an et demi et je ne l'ai pas vu, mon père partait en voyages pendant plusieurs mois alors que j'étais encore une enfant) mais comment lui en vouloir ? Comment reprocher à ce jeune homme le fait de partir parce que c'est trop dur à gérer ?

J'ai fais ce que j'estimais être juste. J'ai pris la pilule du lendemain pensant régler mon problème présent. A. m'a quitté pendant très exactement 11 jours. Avant de revenir. J'étais heureuse, je pensais que l'amour triomphait toujours. Quelques semaines plus tard, j'ai eu besoin de parler à ma mère de ce qu'il s'était passé, elle m'a rassuré et m'a dit que c'était peu probable, mais m'a quand même prit un rendez-vous chez notre médecin de famille le lendemain matin. S'en est suivi une prise de sang, je me rappelle encore de tous les détails 10 ans après, j'étais à jeun (ma charge virale, mes plaquettes, globules etc... on également été contrôlés pendant cette prise de sang) et, alors que l'infirmière mettait les étiquettes sur les éprouvettes, je me faisais des oeufs brouillés. Les résultats sont sortis quelques jours plus tard, je ne les comprenaient pas. Mes résultats de globules, de charge virale etc étaient tous bon, mais, ma prise de sang indiquait que j'étais également enceinte. Des larmes, la colère de ma mère, moi qui m'enferme dans ma chambre pour appeler le service de maternité de l'hôpital le plus proche pour avorter (la veille, A. m'avait dit qu'il me quitterai si je gardais cet enfant. Alors, bien sûr je n'étais pas prête à devenir mère à mon âge, sans réelle situation professionnelle et, avec un couple encore naissant, mais, ces paroles m'avaient fait l'effet d'un coup de poignard dans le coeur), j'appelle A. qui se réveillai, la voix encore endormie il ne m'a rien dit de particulier, il s'est juste assuré que j'allais bien prendre mon rendez-vous, j'ai aussi eu l'une des mes meilleure amie au téléphone, qui elle, pleurait avec moi. Ma mère m'a demandé d'en parler à mon père, je ne voulais pas. Mais je l'ai fais, parce qu'elle me demandait. J'ai vu dans leurs regards la déception, moi, la petite dernière de la famille, celle qui était un modèle, sage, polie, respectueuse, travailleuse, celle en qui ils avaient placé beaucoup d'espoir. Je les avaient deçu.

Quelques jours plus tard, des pertes de sang, abondante. Je saignais pour mon premier rendez-vous chez le gynécologue. Ma mère m'attendait dans la salle d'attente, A. n'était pas là. J'étais seule dans la salle d'examen, seule à fixer par la fenêtre pour ne pas voir l'écran en face de moi que le médecin avait "oublié" d'éteindre, seule à me concentrer pour n'entendre aucun son. Son appareil à l'intérieur de moi il a gratifié mon utérus d'un "ah oui. C'est vide. On va refaire une prise de sang", s'en est suivi un discours moralisateur,* sur mon âge, sur le fait que je ne lui ai pas révélé immédiatement que j'avais le VIH, sur mon projet professionnel "ah. Il n'acceptent pas de mère dans le métier que je voulais faire". J'ai rigolé. Je me suis cachée derrière un rire.

Une nouvelle prise de sang, le jour de la première prise de médicament à l'hôpital était arrivée, je n'avais pas reçu mes résultats, je me suis faite disputer par la secrétaire médicale car je ne connaissais pas le nom exact du laboratoire où étaient mes résultats "je ne vais pas appeler les 2 labos de ce groupe, appelez les et dites leurs de me faxer vos résultats". J'étais dans la salle d'attente, une salle d'attente avec la moitié des murs pistaches et sur les sièges de métal, des femmes enceinte. Et moi. Avec mon papier dans la main, le médecin a d'abord fait passer une future mère avant moi, j'attendais, il sortait de garde. Il devait être fatigué. Il a attrapé mes résultats et les a lu devant la salle "c'est positif. Suivez moi", je n'ai pas réussi à me cacher derrière un quelconque rire, ou sourire. Je me sentais honteuse. Au milieu de toutes ces femmes et leurs ventres ronds, et moi. Seule, avec ma honte. A. n'étais pas là, il dormait. Il avait fini de travailler à trois heures du matin. J'étais seule pour prendre les comprimés devant lui, je suis ensuite retourner au travail. Le lendemain, je n'ai pas trouvé la force de me lever. Je n'avais pas mal, pas de sang, mais, je me sentais mal à l'intérieur de moi, à l'intérieur de mes tripes. Ce n'étais pas une souffrance physique, j'avais juste besoin de rester cette journée là dans mon lit. A pleurer. Le vendredi, je suis retournée à l'hôpital avec ma meilleure amie. A. dormait, il avait une nouvelle fois fini à 3 heures du matin. Elle a passé la matinée avec moi, à essayer de me faire rire, à me changer les idées, nous parlions. Je ne perdais pas de sang, et ça m'inquiétais. Le soir en rentrant chez-moi, j'avais reçu mes résultats. Ils étaient négatifs. J'avais fais une fausse couche. Le médecin s'était trompé. Un médecin, un Homme issu du corps médical, un confrère de ceux qui me suivent depuis 15 ans avait fait une erreur. C'était pour moi inconcevable. Le laboratoire avait fait une erreur, pas le médecin. Le lendemain soir, mes parents devaient aller à un concert, l'une de mes amie était venue passer la nuit à la maison.

Un mois durant, j'avais peur, il était hors de question que A. ne me touche, j'avais peur de retomber enceinte, je ne voulais plus trop voir mes amis, je n'avais pas le moral, je préférai rester chez mes parents, dans ce cocon, voir A. dont la présence me rassurait. Le dernier soir où nous nous sommes vus, nous avons couché ensemble, j'ai eu peur de retomber enceinte une nouvelle fois. Une semaine plus tard il me quittait "tu as changé", "tu n'es plus comme avant, tu ne rigoles plus", "tu me disais quand on s'est mit ensemble que tu me dirais rarement que tu m'aimais, maintenant tu me le dis tout le temps", "tu ne veux plus sortir, tu ne veux voir que moi". Et il est parti, nous sommes restez en contact "d'ici 5 ans, quand tu auras mûri nous nous remettrons ensemble" et moi, je calculais 23 + 5 = 28. Il voulait son premier enfant à 30 ans, peut-être qu'il accepterai de l'avoir à 28. Nous nous sommes revu, une fois à l'hôtel. Je lui avais promis que je ne l'aimais plus, il savait que s'était faux. Mais, nous nous sommes revu, il a essayé de couché avec moi. J'ai paniqué, et ce soir là, il s'est montré attentionné, il a fait coulé un bain chaud pour me détendre, et le lendemain matin, nous nous quittions. Ce fut la dernière fois où nous nous sommes vus.

Les angoisses ont commencé, j'avais peur d'être toujours enceinte de A., à l'équivalent de 5 mois de grossesse, je sentais des bulles dans mon ventre et des fois des coups, puis ça s'est calmé. Ensuite, je me suis mise en couple avec Guillaume, j'ai là aussi eu peur d'être enceinte. Je me suis dis qu'il me fallait du temps, que j'avais besoin d'être seule et je me suis entourée de mes amis. Là encore, alors que je n'avais pas de relations sexuelles, j'ai eu peur de tomber enceinte, sortir, coucher avec l'un d'eux et puis l'oublier, je n'avais plus de moral. J'ai fais ma première crise d'angoisse lors d'une dispute avec mon père un soir d'aout 2013. Je consultais ensuite une psychologue entre midi et deux pendant les cours, je me sentais mal, je passais mon heure à pleurer, un jour, il y a eu un entretien avec ma mère, la psy et moi, la psy m'a qualifiée de personne immature, qui ne voulait pas s'en sortir. Je n'y suis jamais retournée. J'avais trop mal, je me confiais, je vidais mon sac et un jour elle m'avait "j'ai des patient qui ont un cancer et qui ne pleurent pas autant que vous". J'ai arrêté tout suivi, obtenu mon diplôme et puis... Et puis, tout était une épreuve, me lever, m'habiller, rire. Je ne voulais que pleurer, alors j'ai pleuré, j'ai trouvé un semblant de routine en aidant ma mère à la maison, en préparant le repas, en restant en pyjama, voir mes amis étaient parfois une épreuve, alors j'inventais des mensonges pour pouvoir rester dans mon cocon "je suis pas là", "je n'ai pas envie"... J'ai consulté pendant un an dans un CMP, pour une TCC, j'ai fais des exercices de respiration, visualiser un carré et c'était tout. ça ne m'aidait pas.

Et puis nous avons quitté la région.

Je suis arrivée ici, dans cette nouvelle ville, j'étais comme requinquée, j'ai trouvé un stage qui a débouché sur un CDD, je consultais une nouvelle psychologue qui m'a aidé dans mes angoisses de dormir seule, je me sentais bien. Je n'avais même plus peur d'être enceinte. J'ai retrouvé un autre emploi, puis j'ai poursuivi mon parcours scolaire, en alternance. Et puis, j'ai rencontré cet homme, il était grand, beau, intelligent. Un cliché. Et il me faisait rire, tellement rire. J'étais légère, comme une plume. Nous nous sommes mit ensemble, il y a près de 3 ans. Il savait tout, mon angoisse, la maladie, ma peur. Cette peur qui n'avait plus de raison d'être, lui, qui refuse de faire l'amour avant le mariage ne pouvait me mettre enceinte, pourtant j'ai eu peur, j'ai angoissé d'avoir couché avec lui pendant mon sommeil, pendant une sieste, pendant un moment à deux devant la console. Il m'a demandé de ne plus dormir avec lui, c'était la seule option qu'il avait trouvé pour me rassurer. Il avait tout tenté, tout essayé pour me rassurer, me raisonner, mais c'était plus fort que moi. Ensuite, il a arrêté de me conseiller sur comment vivre avec mes angoisses, parce qu'un jour, maladroit dans ses propos il m'avait blessé au plus haut point. Je me suis sentie seule et abandonnée.

J'ai recommencé à consulter depuis plusieurs mois, ma nouvelle psychologue a posé le mot trauma sur ce qui m'est arrivé, mais, nous n'arrivons pas à me faire sortir de cette spirale, depuis quelques semaines, alors que je ne vois plus mon copain en privé, j'ai peur d'être enceinte de l'un de mes collègue, d'avoir couché avec lui et ensuite d'avoir fait une amnésie. Je me sens folle, et je ne sais plus comment m'en sortir, je ne trouve plus de solutions.

Comment guérir d'un trauma ? Est ce que c'est à vie ? Pourquoi, aujourd'hui, 10 ans après j'ai encore cet épisode de ma vie en mémoire et de façon aussi détaillé ? Pourquoi ? Qu'est ce qu'il s'est passé ? Ma psy m'a dit que je devrais être en colère contre A. . Je ne le suis pas, pourquoi l'être ? En quoi ce serait une solution ? Qu'est ce que j'ai ? Qu'est ce qui ne va pas chez-moi ? Aidez-moi je vous en supplie, je ne sais plus quoi faire.


* Bien sûr que je comprends que certain/e/s puissent être contre l'IVG, je peux parfaitement le concevoir, mais, s'il vous plaît, je ne veux pas/peux pas entendre de nouveaux des discours moralisateurs.
Devinezquoi
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Re: Un quart des femmes

Message par Devinezquoi »

Ce que je ne comprends pas c'est :
1) puisque vous avez peur d'être enceinte, pourquoi ne prenez-vous pas la pilule ?
2) Puisque votre psy vous a diagnostiqué un stress post-traumatique, pourquoi n'êtes-vous pas suivie par un professionnel compétent ?
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Brerafab
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Re: Un quart des femmes

Message par Brerafab »

Devinezquoi a écrit : 05 mai 2022, 23:43 Ce que je ne comprends pas c'est :
1) puisque vous avez peur d'être enceinte, pourquoi ne prenez-vous pas la pilule ?
2) Puisque votre psy vous a diagnostiqué un stress post-traumatique, pourquoi n'êtes-vous pas suivie par un professionnel compétent ?
Bonjour,

Merci pour votre message. Je ne sais pas si je réponds correctement...

Dans un premier temps, j'ai pris la pilule mais, à l'époque j'avais encore de vieille tri thérapie qui annulaient les effets, ensuite mon infectiologue a changé mon traitement et depuis, je peux prendre un contraceptifs. Alors, je ne prends pas la pilule mais j'ai un implant (ce qui est au final "la même chose").
Mon psychologue ne m'a pas parlé de stress post traumatique, elle m'a parlé d'un trauma tout court, par contre, elle ne m'a jamais orienté vers un confrère, je pensais qu'elle pouvait m'aider à soigner ça. Pourquoi ? Il faut une prise en charge particulière ?

Elle m'a expliqué que j'avais un trauma et qu'il fallait que je rééduque mon cerveau, et, que la rééducation passait par le fait d'accepter d'avoir peur, mais, de la contrôler. Et, c'est là où je n'y arrives pas. Je ne sais pas comment faire, si ce n'est me raisonner mais, ça marche peu et, surtout ça fonctionne lorsque je suis rationnelle, si je suis en train d'angoisser je n'y arrives pas
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Re: Un quart des femmes

Message par Brerafab »

J'ai oublié une autre question, je ne comprends pas pourquoi moi qui ai eu une belle vie, qui ai eu de la chance, je n'arrives pas à surmonter cela alors qu'une autre de mes amie (même si dans la psychiatrie il ne faut pas se comparer parce que chacun est différent) est arrivée à l'accepter et passer à autre chose alors que moi non.
Devinezquoi
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Re: Un quart des femmes

Message par Devinezquoi »

Mon psychologue ne m'a pas parlé de stress post traumatique, elle m'a parlé d'un trauma tout court, par contre, elle ne m'a jamais orienté vers un confrère, je pensais qu'elle pouvait m'aider à soigner ça. Pourquoi ? Il faut une prise en charge particulière ? Elle m'a expliqué que j'avais un trauma et qu'il fallait que je rééduque mon cerveau, et, que la rééducation passait par le fait d'accepter d'avoir peur, mais, de la contrôler.
*** Votre "trauma" n'a que faire de ces considérations intellectuelles !
Quel protocole thérapeutique a-t-elle mis en place pour que vous soyez en mesure
de parler de vos émotions ?
DUBREUIL -psychologie clinique - analyste - psychomotricité - modérateur Centraide
Devinezquoi
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Re: Un quart des femmes

Message par Devinezquoi »

J'ai oublié une autre question, je ne comprends pas pourquoi moi qui ai eu une belle vie, qui ai eu de la chance, je n'arrives pas à surmonter cela alors qu'une autre de mes amie (même si dans la psychiatrie il ne faut pas se comparer parce que chacun est différent) est arrivée à l'accepter et passer à autre chose alors que moi non.

*** "même si dans la psychiatrie il ne faut pas se comparer parce que chacun est différent"
Vous avez votre réponse.
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Brerafab
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Re: Un quart des femmes

Message par Brerafab »

Devinezquoi a écrit : 07 mai 2022, 19:39 Mon psychologue ne m'a pas parlé de stress post traumatique, elle m'a parlé d'un trauma tout court, par contre, elle ne m'a jamais orienté vers un confrère, je pensais qu'elle pouvait m'aider à soigner ça. Pourquoi ? Il faut une prise en charge particulière ? Elle m'a expliqué que j'avais un trauma et qu'il fallait que je rééduque mon cerveau, et, que la rééducation passait par le fait d'accepter d'avoir peur, mais, de la contrôler.
*** Votre "trauma" n'a que faire de ces considérations intellectuelles !
Quel protocole thérapeutique a-t-elle mis en place pour que vous soyez en mesure
de parler de vos émotions ?
Je ne sais pas, je ne savais même pas qu’il y avait des protocoles. Une séance type commence par comment « comment allez-vous » et ensuite, je parle. Mais j’ai l’impression de tourner en rond, à répéter toujours les mêmes choses et je m’énerve parce que je ressasse mais n’avance pas. En gros, je parle pendant 1 heure et il n’y a pas vraiment de question, c’est échange comme je pourrais en avoir avec une copine.
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