Urgent, c'est le tournant de ma vie

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Dubreuil
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L'INCESTE ET AUTRES SEVICES SEXUELS SUBIS PAR L'ENFANT

L’enfant, le juge et la psychanalyse.
Paris : Gallimard, 1999, 128 p.
Andrée Ruffo est juge à la chambre de la Jeunesse et siège à la Cour du Québec.
Deux entretiens : à Paris en 1986 ; à Montréal en 1987.

« Andrée Ruffo : Il arrive souvent avec des enfants de douze, treize ans, qu'on nous dise :
“Cet enfant a des troubles de comportement”, parce qu'il a vécu un inceste, parce qu'il a
été rejeté, parce qu'il a été méprisé. Mais moi, je refuse de lui accorder la protection pour
ses troubles.
Françoise Dolto : Mais vous avez tout à fait raison parce que l'important c'est : puisqu'il a
survécu, qu'est-ce qu'il y a eu de suffisant pour y prendre son pied ? Si un être est
vraiment traumatisé, il tombe malade ; si un être n’a pas de quoi vivre, il ne continue pas.
A. R. : Vous savez, souvent, quand je vois des enfants en colère devant moi, je me dis à
moi-même : “C'est merveilleux. Bravo.” Je ne pense pas que je doive, comme juge, le leur
dire. Mais cette colère-là, pour moi, c'est leur façon d'exprimer qu'ils veulent survivre.
F. D. : Oui, c'est ça. » (p. 33)
« A. R. : Et ils n'ont pas été écrasés. Ils disent : “Vous m'avez fait mal. Bien. Je vous ferai
mal.” Et moi, je trouve ça sain ; je trouve ça sain dans le développement d'une personne,
pas au niveau de la société.
F. D. : C'est-à-dire qu'on leur a appris un langage. Le langage n'est pas que de la parole ; le
langage, c'est manière d'homme, manière d'humain. “Manière d'humain, c'est de faire mal
à un humain ? Bon. Eh bien, je deviens une grande personne et je ferai mal aux humains !
— Mais ce n'est pas ça l'important. Puisque tu avais choisi ces parents-là pour naître et
que tu as survécu à quelque chose qui t'a fait mal, pour quelle raison crois-tu que tu as
survécu ? Pour en faire quoi ? Changer les choses peut-être !”
Mais le rôle du juge, c'est qu'à partir de là l'enfant se prenne davantage en charge ; c'est
surtout, je crois, la prévention, c'est-à-dire la mise au courant des lois des enfants très
jeunes. Si les enfants savaient que la loi interdit les privautés sensuelles et sexuelles entre
adultes et enfants, eh bien, à partir du moment où un adulte le lui demande, s'il accepte,
c'est qu'il est complice, il n'a pas à se plaindre. Mais il peut avoir, sans se plaindre, à dire :
“Mais ça m'a fait très mal. — Oui. Pourquoi t'es-tu laissé faire puisque tu savais que ce
n'était pas permis...” À partir du moment où l'enfant est au courant, très jeune, de la loi, il
est complice et on peut l'aider beaucoup mieux.
A. R. : Je comprends très bien. À ce moment-là, on ne lui donne pas un rôle de victime. »
(p. 34)
« Andrée Ruffo : “Quand le juge reçoit un enfant victime d’abus sexuels, il faut aussi parler
des mères.
Françoise Dolto : Bien sûr, puisque c'est une situation triangulaire qui est boiteuse, et
c'est pour ça que ça peut arriver. Tant de mères sont complices de ce qui se passe entre
le père et ses enfants, pour que celui-ci reste à la maison, pour qu'il n'aille pas ailleurs.
A. R. : Mais quand le père nie et que la mère est complice, que la mère refuse ou est
incapable de protéger son enfant, qu'il faut le retirer du milieu familial, qu'arrive-t-il de
cette relation avec le père ?
F. D. : Ça dépend de chaque enfant, et je crois que ça dépendra de la relation maturante
qu'il va rencontrer avec la famille dans laquelle il sera placé, ou avec l'éducateur avec qui il
pourra parler et qui pourra justement lui faire comprendre que l'excitation dans laquelle
était son père, peut-être sans l'avoir cherché, l'enfant en était complice. Parce que je crois
que ces enfants sont plus ou moins complices de ce qui se passe. » (p. 81)
« Andrée Ruffo : On a beaucoup d’enfants qui sont victimes d’abus sexuels. [...] Comment
expliquer cette folie ? Ça a peut-être toujours existé. Mais Dieu, on l'entend tous les jours.
Pourquoi cette folie d'abuser des enfants ?
Françoise Dolto : Mais je pense que c'est une contamination qui vient de ce qu'on voit
tellement de fantasmes au cinéma, à la télévision. Pourquoi pas ce fantasme-là, pourquoi
ne se réaliserait-il pas ? C'est pour ça que les enfants doivent être avertis, prévenus,
avertis de leur rôle, de leur coresponsabilité, de leur complicité : “Bien, tu le savais, alors
pourquoi l'as-tu fait ? Bon, maintenant tu diras à ton père ou à ton grand frère que c'est
défendu, que tu m'en as parlé et que c'est fini maintenant entre vous.” » (p. 86)
« A. R. : Et est-ce qu'il est utile pour les enfants qu'il y ait un jugement social, que l'enfant
soit déclaré victime ?
F. D. : Non, justement, c'est très difficile parce que ça le marque pour la vie. Si ça se passe
à huis clos, entre l'enfant et les parents, c'est beaucoup mieux. C'est bien dommage ce
qui s'est passé. Il faut dorénavant que ce soit terminé et que ça ne soit pas toute une
histoire. Ce sont des choses qui se passent dans le cabinet du psychiatre ou du médecin
qui justement le garde en secret professionnel. Il travaille avec les parents pour ce
dérapage dans leur vie imaginaire. C'est toujours sous médicament ou sous alcool que les
choses se sont passées. » (p. 87)
« A. R. : Mais quand c'est le père, et qu'il nie...
F. D. : Il a raison. C'est pas le même, celui qui nie et celui qui l'a fait. Quand on leur dit ça :
“Oui, vous avez raison, celui qui dit ‘non’ aujourd'hui, il a raison, parce que c'est
impensable pour vous. Vous vous sentiriez un salaud si vous l'aviez fait avec toute votre
conscience. Donc vous n'aviez plus votre conscience. »
A. R. : Et qu'est-ce que vous faites en tant que juge pour enfants ?
F. D. : On prévient l'enfant : “Ça ne recommencera pas, sans ça tu seras complice.” »
(p. 88)
Les enfants sont responsables
« Andrée Ruffo : Les enfants se sentent tellement coupables ! C'est leur donner la
permission de grandir de leur dire qu'ils ne sont pas responsables de leurs parents.
F. D. : Ils sont responsables de laisser les parents commettre un acte qui les avilit dans
leur relation à leurs enfants.
A. R. : C'est que les gens se donnent toujours des responsabilités. Les parents sont
responsables des enfants ; les enfants sont responsables des parents. Finalement, chacun
devrait être responsable de sa vie, en laissant à l'autre la responsabilité de la sienne.
F. D. : Absolument. Mais, pour ça, il faut qu'il ait été instruit des lois, des lois de tout le
monde et pas des lois de tel foyer. » (p. 53)
Les enfants ne devraient pas demander la permission
« Andrée Ruffo : Les enfants ont souvent l'impression — et ça, c'est une très mauvaise
éducation, j'en suis certaine — qu'ils ont besoin de la permission de leurs parents. C'est le
contraire.
Françoise Dolto : Mais oui ! Je ne sais pas comment c'est chez vous mais, chez nous, à la
maternelle et à l'école primaire, les enfants doivent demander la permission pour aller faire
leurs besoins, alors que si les enfants s'intéressaient à la classe, même s'ils avaient besoin,
ils resteraient dans la classe, ils se tiendraient sur une jambe puis l'autre pour oublier leurs
besoins. Ce qui prouve que les maîtres ne sont pas intéressants. II faut demander la
permission. On doit demander la permission. C'est terrible cette éducation. » (p. 58)
Si on est né, c’est parce qu’on a « désiré » naître
« Andrée Ruffo : II y a des enfants qui n'ont jamais reçu. Ils survivent, ils sont là. Et s'ils
sont là, c'est parce qu'ils ont survécu. Mais comment arrive-t-on, quand ils ont huit ans,
dix ans, douze ans, à leur transmettre qu'il y a quelque chose de bon en eux ?
Françoise Dolto : On peut leur dire : “Il y a une raison pour laquelle tu es là. C'est toi qui
l'as voulu.” C'est ça qu'on oublie, qu'un enfant ne naît que parce que l’être humain désirait
naître. Ça serait tellement facile de fausse-coucher s'il n'y a pas de quoi vivre ! Mais il a
survécu. » (p. 76)
Les enfants chez le juge après un délit - La castration n’est pas
une mutilation
« Andrée Ruffo : Quand les enfants arrivent devant moi et qu'ils ont commis un délit, ils
crient leur colère. Finalement, ils disent leur colère contre la société, ils disent qu'ils sont
fâchés. Moi, je trouve ça sain.
Françoise Dolto : 0ui.
A. R. : Mais ce sont des enfants tristes, des enfants qui sont comme vidés de tout.
F. D. : Oui, parce qu'ils ne sentent personne pour les soutenir, et c'est là, en eux-mêmes.
Ils se sentent idiots d'avoir été pincés et ils ont honte de s'être laissé avoir parce qu'ils
connaissaient plus ou moins la Loi. Mais ils ne savaient pas comment ils pouvaient y
échapper tellement leur processus de défense les obligeait à se faire prendre. Ce que
nous appelons en psychanalyse “recevoir la castration”, c'est-à-dire recevoir la Loi de
personnes qui la respectent et qui leur disent la Loi pour qu'ils deviennent libres.
Alors que beaucoup de ces enfants avaient reçu la Loi de gens qui ne la respectaient pas
eux-mêmes. Quand un enfant entend : “C'est défendu de faire telle chose !” mais que le
père fait la chose défendue, eh bien, il ne reçoit pas la castration, c'est comme une
mutilation. » (p. 77s)
La psychanalyse : qui peut la pratiquer ? qu’est-ce que c’est ?
« Andrée Ruffo : Notre problème avec les psychanalystes au Québec, entre autres — et
moi, je suis bien prête à travailler là-dessus —, c'est que tout le monde se dit
psychanalyste. Ça c'est le danger.
Françoise Dolto : Tout le monde est psychanalysé, peut-être, mais tout le monde n'est pas
psychanalyste.
A. R. : Je le sais, mais chez nous, au Québec, il n'y a aucune loi qui régit les
psychanalystes, il n'y a aucune corporation, il n'y a aucun contrôle non plus.
F. D. : Ici non plus. » (p. 37)1
[…]
« A. R. : Mais on ne comprend pas ce que c’est. Il faut réaliser ça.
F. D. : Eh non, parce que c’est une relation d’inconscient à inconscient. On comprend une
psychothérapie de soutien, de soutien à vivre normalement soi-disant, à vivre tous aussi
fous les uns que les autres. [italiques de Dolto]
A. R. : Mais la psychanalyse, on ne comprend pas et on ne la respecte pas du tout parce
qu’on veut l’utiliser pour, soi-disant, mieux connaître la personne. » (p. 38)
« F. D. : Alors que ce n'est pas ça du tout. Au contraire, à la fin d'une psychanalyse, le
psychanalyste ne connaît pas la personne, la personne ne se connaît pas plus. Elle a
simplement une histoire qui ne l'intéresse plus, et elle est à aujourd'hui qui prépare
demain. Son histoire ne l'intéresse plus. Elle ne répète plus perpétuellement les mêmes
modes de relation parce qu'elle a liquidé tout ce passé qui a fait d'elle ce qu'elle est
aujourd'hui. Et ce qu'elle est aujourd'hui, c'est ce qui est positif, qui préparera demain, à
condition que aujourd'hui, demain on n'en parle plus. » (p. 39)
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
Dubreuil
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CARL GUSTAV JUNG
Le psychanalyste dissident

Psychiatre, psychologue et essayiste d’origine suisse, Carl Gustav Jung participa si activement aux débuts de la psychanalyse que Freud le nomma comme son « successeur ». Mais il ne fallut pas longtemps au « maître de Vienne » pour s’en séparer à cause de leurs désaccords théoriques et personnels. Jung fondera sa propre école de « psychologie analytique », connue aussi sous le nom de psychologie profonde ou complexe.

Jung est né en juillet 1875 en Suisse allemande, au sein d’une famille de tradition cléricale du côté de son père pasteur et de tradition médicale du côté de sa mère férue d’occultisme et de spiritisme. Il voit dans cette double filiation l’origine de ses « deux personnalités ». La personnalité 1 « consciente, conventionnelle et inoffensive ». La personnalité 2 «inconsciente…redoutable ».
Enfant introverti et solitaire Jung est très tôt témoin de scènes violentes ou macabres liées au métier de pasteur exercé par son père. Sa mère dépressive fait de fréquents séjours en maison de repos. Il est en fait éduqué par des servantes.

Alors que son père est affecté comme aumônier à la clinique psychiatrique universitaire de Bâle, il découvre ses lectures sur les maladies mentales. Sujet à de nombreuses syncopes inexpliquées il se penche sur la notion de névrose et sur les lectures de philosophes : Hartmann, Nietzsche, Goethe, Schopenhauer, Kant, Hölderlin… Tous les mythes de tous les pays et de toutes les cultures deviennent ses thèmes de prédilection.
En 1895, son père décède brutalement d’un cancer et Jung, intronisé chef de famille, s’inscrit à la fac de médecine de Bâle où il étudie avec intérêt l ‘anatomie et la physiologie, mais ce sont l’archéologie et l’anthropologie qui l’intéressent particulièrement. Il obtient son diplôme en septembre 1900.
Vers la fin de ses études, ses lectures de Krafft-Ebing et ses thèses sur la sexualité le poussent à choisir la Médecine psychiatrique comme spécialité. Mais, alors que la psychiatrie ne s’intéresse pas du tout aux phénomènes « occultes », il choisit pour sa thèse, de s’intéresser à une jeune médium, Hélène Preiswerk. A côté de ses activités scientifiques, il participe à des séances de spiritisme qui constituent la matière première de sa thèse consacrée aux « Phénomènes dits occultes ».
En juin 1895 il étudie le phénomène des tables tournantes au sein même de sa famille observant le cas d’une cousine medium et rassemblant des matériaux qu’il utilisera durant toute sa carrière.

Lorsqu’il s’inscrit à l’Université de Zurich en 1900, Jung est engagé par Eugen Bleuler comme second assistant psychiatre à la clinique psychiatrique universitaire considérée comme un établissement d’avant garde.
Sa thèse achevée, Jung collabore de 1901 à 1904 avec son cousin Franz Riklin à la méthode des « associations de mots ». Ils observent que les patients confrontés à des mots liés à un vécu personnel douloureux ont des temps de réaction variables et les étudient. Ils proposent le terme de « complexes » pour désigner ces « fragments psychiques à forte charge affective séparés du conscient ». Jung met au point un galvanomètre permettant l’enregistrement de la réponse électrodermique du sujet aux mots inducteurs.
A la même époque il se penche sur le phénomène du somnambulisme médiumnique. En 1902 son congé sabbatique le conduit à Paris (près de Pierre Janet et d’Alfred Binet) puis à Londres. A son retour il est nommé professeur adjoint à l’Université de Zurich et aménage avec celle qu’il a épousée en 1903, Emma Rauschenbach, avec qui il aura 5 enfants.

Rencontre avec Freud
Jung lit « L’interprétation des rêves » en 1899. L’ouvrage le passionne. Il se rend compte qu’ils en sont tous deux arrivés aux mêmes conclusions à partir d’un travail sur les associations. Sa thèse recèle de références à Freud. Vers 1903 il prend ouvertement parti pour lui alors que Freud est très controversé ; il ne le rencontrera qu’en 1907 à Vienne, dans une discussion qui durera 13 heures. Cette rencontre avec le père de la psychanalyse de 19 ans son aîné fut déterminante pour Jung. Les deux hommes échangèrent près de 360 lettres en l’espace de huit ans et Freud le désigna comme son « fils et héritier scientifique », comme son « dauphin ». Jung devint alors membre de la Société Psychanalytique de Vienne et créa son propre cabinet d’analyse. Cependant, alors que Freud souhaitait que Jung mette toute son énergie et son temps dans la promotion de la psychanalyse, le psychiatre suisse nourrissait d’autres préoccupations et désobéissait à son père spirituel qui le supportait très mal… Il fut ainsi élu membre honoraire de la Société américaine de recherches psychiques pour ses « mérites comme occultiste ».

En effet, si Freud se situait dans une lignée biologiste, Jung s’intéressait à l’hypnose et au spiritisme que Freud jugeait inintéressants. La théorie de Freud était basée sur l’aspect sexuel de la libido, tout ce qui ne serait pas directement sexuel provenant de la sublimation ou du refoulement de cette force. Ce qui choquait Jung qui répondait : « mais alors, la culture ? ». « La culture n’est que la mascarade du refoulement et de la sublimation » répondait Freud. Cependant, au fur et à mesure que Jung s’intéressera aux mythes et à la question du sacré il découvrira d’autres dimensions débordant de beaucoup l’histoire personnelle de l’individu et se démarquera peu à peu de la conception exclusivement pansexuelle de Freud. Il la trouvait réductive et considérait que bien au-delà de ce qui peut être transcrit verbalement gît dans l’individu quelque chose qui passe de génération en génération et oriente sa vie. Pour lui, quelque chose dans l’homme est perpétuel, infini, immuable et trouve le moyen de surgir dans sa réalité à des moments singuliers de la vie. D’où la notion d’un « inconscient collectif » constitué d’archétypes (la notion mère/enfant est régie par l’archétype de la mère par exemple) et qui serait commun à la nature humaine.

Au départ, Freud et Jung avaient en commun une prise de conscience concernant l’exercice de la religion prisonnière d’un dogme, ne remplissant plus sa fonction de lien au sacré. Freud réagit en niant le sacré, devenant complétement matérialiste dans sa vision des choses. Remplaçant le Dieu-esprit par un Dieu-matière : la sexualité. Jung retourna à la source, se penchant, lui, sur les mythologies et les religions dites primitives.
En réaction aux positions inébranlables de Freud, Jung manœuvra toujours de telle sorte que ses conceptualisations ne donnent jamais lieu à des doctrines fermées, de sorte qu’il est parfois difficile de se repérer dans son œuvre et de faire la différence entre l’ombre, l’anima et l’animus, par exemple. Il est tout aussi difficile de savoir s’il est croyant.
Pour Freud, c’est le moi qui est au centre de la psyché, entre le ça (les pulsions refoulées) et le Surmoi (il exerce la censure contre les pulsions instinctives condamnées par les parents). Pour lui, l’inconscient est dangereux et difficile à approcher.
Pour Jung, le centre de la psyché, c’est le Soi, archétype central de la personne psychique : il englobe le conscient et l’inconscient. Jung a un grand respect pour l’inconscient, cette énorme force qui est aussi Dieu : « le royaume de Dieu est au-dedans de nous, il faut dialoguer avec », c’est ainsi qu’on enrichit la conscience. Il y aurait une sorte de dialectique entre conscient et inconscient qui dessinerait peu à peu une vérité et un chemin de qualité. C’est ainsi que l’être pourrait accéder à une véritable place parmi les autres : l’individuation. Sans cette élaboration, l’individu demeurerait plus ou moins prisonnier du marquage collectif et donc, susceptible d’être pris à tout moment par un phénomène de groupe, une rumeur, une opinion, etc.

Freud finissant par voir en Jung un « dissident » le fit bannir officiellement en août 1912.
Comme pour officialiser cette rupture qui le confronta à une désorientation totale, Jung présenta succinctement au XVIIe congrès international de médecine organisé à Londres sa nouvelle approche qu’il nomma « psychologie analytique » la distinguant de la psychanalyse de Freud. Jung présenté comme le seul rival possible de Freud permit alors à Zurich de devenir le berceau de la psychologie analytique, réunissant la plupart des analystes zurichois qui avaient rompu avec Freud. Il voyagea beaucoup se rendant de nouveau aux Etats Unis puis en Palestine, en Angleterre et en Inde, en 1937.
Ce voyage fut « un moment décisif dans sa vie ». Découvrant la spiritualité indienne, il découvrit un système donnant autant de place au Bien qu’au Mal, deux concepts sans connotation morale. Il y rencontra des auteurs de traités sur le yoga et sur le culte Kâli à Calcutta qu’il synthétisa dans son ouvrage « Psychologie et orientalisme ».

Prises de positions ambiguës
En 1935 le corps médical britannique invita Jung pour une série de conférences à Londres. Il y présenta sa théorie et la notion d’inconscient collectif ainsi que l’importance de la religiosité du patient dans le cadre de la cure avançant même que le système de la confession est une psychanalyse avant l’heure.

En 1936 alors qu’il est invité pour une autre intervention à Harvard, son discours est reçu de manière mitigée. Il est accusé de sympathies nazies à cause d’un article sur « La psychologie de la dictature ». Il dit voir dans le président Franklin Roosevelt un dirigeant semblable aux dictateurs Hitler et Mussolini. Il assimile aussi Hitler à un médium et affirme que « la politique allemande ne se fait pas, qu’elle se révèle à travers Hitler, porte parole des Dieux comme jadis ». L’idée qu’il serait pro-nazi est encore renforcée par le fait que Jung se serait rendu en Allemagne en 1936 invité par Joseph Goebbels, chef de la propagande nazie qui aurait voulu son opinion sur l’état psychique des dignitaires du parti national-socialiste. La particularité de Jung est que, contrairement à Freud qui prônerait une « science juive », la psychologie analytique est bien perçue par les nazis. Ils utilisent le concept d’inconscient collectif dans un sens plus politique que scientifique pour justifier l’existence d’un inconscient racial justifiant le « lebensraum », politique territoriale dans laquelle la patrie serait réservée aux seuls Allemands. En réalité les propos de Jung sont ambivalents car il tente de satisfaire le régime tout en ne se désignant pas comme un nazi. En 1936 il se trouve acculé à préciser sa position et explique que la psychothérapie ne peut être inféodée à une politique nationaliste. Cependant, selon l’historienne Elisabeth Roudinesco, Jung aurait été proche du nazisme puis aurait ensuite cherché à le taire. Nous passerons rapidement ici sur l’histoire entre Jung et le régime nazi qui est tellement complexe et pleine de rebondissements qu’elle mériterait un livre à elle seule. Il semblerait même que Jung soit devenu agent secret après guerre, recruté sous le nom d’agent 488 par les services secrets alliés.
Précisons cependant que Jung, apprenant que Freud était en sécurité en Angleterre, lui aurait envoyé un télégramme de sympathie et qu’il serait devenu « passeur de Juifs » en exil vers la Suisse.

Vers 1956, des amis et proches de Jung le sollicitent pour qu’il écrive son autobiographie. Plusieurs tentatives ont lieu mais ce sera finalement sa secrétaire Anielle Jaffé qui rédigera « Ma vie. Souvenirs, rêves et pensées », livre publié en 1961, année de la mort de Jung. La période controversée de la guerre n’y sera pas évoquée.

Jung meurt paisiblement le 6 juin à l’âge de 85 ans. Sa famille fait confectionner deux moulages de son visage mortuaire. A la nouvelle de sa mort les hommages internationaux se sont multipliés. Lors d’une cérémonie commémorative, l’analyste jungien Edward F. Edinger conclut son discours par un appel solennel : « Jung n’est plus, mais les retombées de son génie ne font que commencer. »

Sorti de la psychanalyse…
Freud et Jung étaient aussi en désaccord à propos du transfert. Même s’ils envisageaient tous deux ce concept, Freud pensait que, pour qu’il se produise, il devait y avoir une certaine asymétrie dans laquelle l’analyste servirait d’objet, d’écran vide, sur lequel le patient pourrait transférer fantasmes, figures représentatives de son histoire, etc.
Basant ses réflexions sur sa connaissance de l’alchimie, Jung estimait que la relation thérapeutique était basée sur la métaphore de deux corps chimiques différents qui, mis en contact, se modifieraient mutuellement. On peut alors comprendre que la question du divan devait aussi les séparer : pour Freud il était essentiel de laisser l’analyste hors de la vue du patient alors que Jung prônait le face à face et la relation directe constante.

Bien qu’il soit assez habituel d’entendre l’expression « psychanalyste jungien », c’est une erreur nominative. Jung n’est pas, au même titre que Freud, considéré comme psychanalyste puisqu’il a décidé de se séparer complétement de cette école.

D’ailleurs, si Jung fut fortement attaqué de son temps par les psychanalystes freudiens, il le fut aussi par la seconde génération de psychanalystes représentée par Donald Woods Winnicott ou Jacques Lacan. Dominique Bourdin, dans son livre « La psychanalyse de Freud à aujourd’hui » le critique ainsi : « Renonçant aussi bien au rôle de la sexualité infantile qu’au rôle organisateur de la crise oedipienne dans l’histoire singulière de chaque individu, Jung est sorti de la psychanalyse (…) Peut-être est-ce un prophète du retour au religieux indépendamment des églises traditionnelles (…) Il a délibérément quitté le terrain des sciences humaines et de la pensée rationnelle… »

Bibliographie
L’oeuvre de Jung est considérable et touche plusieurs domaines : alchimie, anthropologie, astrologie, ethnologie, étude des rêves, monde contemporain, mythologie, orientalisme, …

L’analyse des visions
Cet imposant ouvrage de 1400 pages comprend une série de 86 conférences où la pensée de Jung s’exprime avec clarté. Le lecteur a la possibilité, grâce au Résumé-Index, d’accéder directement à différents thèmes à partir de phrases clefs. Un plus indéniable !

Aïon – Etudes sur la phénoménologie du Soi
Le processus d’individuation vécu et décrit par C.G. Jung constitue l’axe de la psychologie des profondeurs et aboutit à la réalisation d’une totalité psychique transcendant le moi et dénommée Soi. Publié en 1951, traduction française en 1983 aux éditions Albin Michel par Etienne Perrot et Marie-Martine Louzier-Sahler.

Aspects du drame contemporain
“Des temps aussi foncièrement troublés que notre époque influencent si puissamment les décours psychiques de l’individu que le médecin se voit contraint d’accorder une attention accrue aux interférences suscitées dans l’âme de ses patients par les contingences de l’actualité.” Dans ce contexte C.G. Jung a regroupé dans cet ouvrage plusieurs textes publiés à des époques différentes : 1928, 1936, 1945/1946 et 1958. Edité aux éditions Georg, traduction de Roland Cahen.

Bibliographie raisonnée des écrits de C.G. Jung
Cette Bibliographie raisonnée des écrits de C.G. Jung, rédigée par Juliette Vieljeux et Florent Serina, est l’outil indispensable pour établir les liens entre les différents écrits de C.G. Jung et les positionner dans le temps.
Édité aux éditions Le Martin-Pêcheur/Domaine jungien.

C.G. Jung parle
A travers plus de cinquante récits de conversations les plus diverses, ce livre tente de saisir la personnalité et l’esprit de C.G. Jung. On y trouve des interviews pour les journaux, la radio, la télévision, un grand film didactique, ou encore les souvenirs de ses patients, élèves, collègues ou visiteurs. Aux éditions Buchet Chastel, traduction par Marie-Martine Louzier-Sahler et Benjamin
Sahler.

Commentaire sur le Mystère de la Fleur d’Or
Le Mystère de la Fleur d’Or est un traité alchimique chinois taoïste, que le missionnaire protestant Richard Wilhelm a fait connaître à Jung en 1928.
Aux éditions Albin Michel, traduit par Etienne Perrot.

Correspondance 1906 – 1940
A travers des lettres qui vont en se multipliant au fur et à mesure que Jung avance en âge nous assistons comme en direct à l’élaboration de ses idées.
Aux éditions Albin Michel. Traduit par Josette Rigal et Françoise Périgaut.

Correspondance 1941 – 1949
Dans ce second volume, tandis que l’espérance revient peu à peu, suite à la seconde Guerre Mondiale, on voit Jung approfondir sa quête. Un livre indispensable pour comprendre tout un pan de l’histoire des idées au milieu de notre siècle.
Aux éditions Albin Michel, traduit par Françoise Périgaut et Claude Maillard.

Correspondance 1950 – 1954
En 1950, Jung atteint ses soixante-quinze ans. C’est aussi le moment où, après les années d’approfondissement, sa pensée en arrive à sa dernière efflorescence et où Jung débouche sur certaines de ses oeuvres majeures.
Aux éditions Albin Michel, traduit par Claude Maillard et Christine Pflieger Maillard.

Correspondance 1955 – 1957
En 1955, l’œuvre de Jung, maintenant âgé de quatre-vingts ans, est en majeure partie achevée. Il poursuit sa correspondance avec une disponibilité extrême, répondant quasiment à chacun, du plus illustre à l’inconnu.
Aux éditions Albin Michel. Traduit par Claude Maillard.

Correspondance 1958 – 1961
Malgré tous les efforts qu’elle lui coûte, on est stupéfait de l’activité épistolaire qu’il continue à déployer afin de s’expliquer encore et toujours sur sa conception de la psychologie ou d’émettre sans cesse de nouvelles hypothèses.
Aux éditions Albin Michel, traduit par Alix Gaillard-Dermigny et Christian Gaillard.

Correspondance S. Freud – C.G. Jung
L’intense activité épistolaire, 360 lettres échangées en l’espace de huit ans, éclaire les relations entre Sigmund Freud et Carl Gustav Jung.
Aux éditions Gallimard, traduit par Ruth Fivaz-Silbermann.

Correspondance W. Pauli – C.G. Jung
Deux géants du XXeme siècle, l’un dans le domaine de la physique quantique, l’autre dans celui de la psychologie, échangent de nombreuses lettres. Ainsi voit-on apparaître le concept révolutionnaire de synchronicité.
Aux éditions Albin Michel. Traduit par Françoise Périgaut.

Dialectique du moi et de l’inconscient
La confrontation avec l’inconscient passe par l’étude des rêves et des fantasmes. Ceux-ci nous renseignent sur l’attitude de notre “moi” mais également sur la dynamique de l’inconscient.
Publié en 1935, traduction française en 1964 par Roland Cahen, il a fait l’objet de nombreuses rééditions aux éditions Galllimard.
C.G. Jung Entretiens
A la fin des années 50, C.G. Jung a participé à des rencontres, invité par un couple d’amis à Winterthour, et par l’Institut qui porte son nom à Zurich.
Aux éditions La Fontaine de Pierre, traduit de l’allemand et de l’anglais par Monique Bacchetta, Jeanne Kohli-Dangel et Ariane Pedroli.

Entretiens (Richard Evans – C.G. Jung)
Le livre est issu d’entretiens que Richard Evans, professeur de psychologie à l’université de Houston, a eus avec Carl Gustav Jung à Zürich, en 1961.
Publié en 1961, traduit par Ph. Coussy. Éditions Petite Bibliothèque Payot.

Essai d’exploration de l’inconscient
Ce texte, l’un des derniers écrits par Jung, donne l’exemple de l’importance que Jung accordait à ses rêves. Il nous renseigne sur le devenir de la conscience.
Publié en 1961, traduit par Laure Deutschmeister. Éditions Gallimard, collection Folio Essais,

Essai sur la symbolique de l’esprit
Jung dévoile les fondements les plus certains de sa position envers les phénomènes religieux : ni approbation béate comme on l’a cru souvent, ni croyance en une sorte de sacré nébuleux auquel il suffirait de s’abandonner pour goûter aux extases de l’âme.
Plusieurs textes publiés en 1948 et 1952, traduits par Alix et Christian Gaillard et Gisèle Marie. Éditions Albin Michel.
Introduction à la psychologie jungienne
En 1925 C.G. Jung anime un séminaire où il aborde le développement de ses idées et sa propre expérience.
La trentaine de participants enrichissent par leur questionnement chacun des thèmes abordés. Traduit de l’anglais par Karen Hainsworth et Viviane Thibaudier. Éditions Albin Michel.
Introduction à l’essence de la mythologie
Les études de Carl Gustav Jung et Charles Kenéryi réunies dans ce livre apportent de nombreux matériaux nouveaux ou peu connus, qui contribuent à une meilleure connaissance de la pensée mythologique, ce mode d’expression commun à toute l’humanité.
Publié en 1951, traduit par H. Del Medico. Éditions Petite Bibliothèque Payot.

La guérison psychologique
Ce livre est composé de plusieurs textes ayant pour thème la guérison psychologique. Qu’est ce que la psychothérapie ? Médecine et psychothérapie. Les problèmes de la psychothérapie moderne… Textes publiés en 1945, 1946, 1948 et 1951, traduits par Roland Cahen. Éditions Georg.

L’Âme et la Vie
Ce choix de textes – plus d’un millier – éclaire et illustre les aspects les plus caractéristiques, les plus accessibles aussi, de Jung.
L’ouvrage s’adresse moins au spécialiste qu’au lecteur soucieux de découvrir les perspectives originales qu’ouvre cette pensée sur les domaines les plus importants de l’existence humaine. Textes essentiels réunis et présentés par Jolande Jacobi, traduits par Roland Cahen et Yves Le Lay. Éditions Buchet Chastel et Le Livre de Poche.

L’Âme et le Soi
Avec pour sous titre Renaissance et Individuation ce volume réunit plusieurs textes majeurs et inédits dont le texte fondamental sur la fonction transcendante.
Textes publiés de 1905 à 1954, traduits par Claude Maillard, Christine Pflieger-Maillard et Roland Bourneuf. Éditions Albin Michel.

L’analyse des rêves
En deux volumes, retranscription de notes prises par des membres qui ont assisté au séminaire de C.G. Jung de 1928 à 1930
A partir de nombreux exemples, Jung donne un véritable enseignement clinique pratique. Traduit par Jean-Pierre Cahen. Éditions Albin Michel.

La réalité de l’âme
Volume 1 : Structure et dynamique de l’inconscient
Volume 2 : Manifestations de l’inconscient
Sous ces deux thèmes Michel Cazenave a rassemblé plusieurs textes de Jung.
Éditions Le Livre de Poche.

Le Livre Rouge
Le Livre Rouge rassemble les notes et les dessins les plus intimes que C.G. Jung ait réalisés.
Il témoigne des tensions qui l’habitent à l’époque et documente sa confrontation avec l’inconscient, qui s’accompagnera parfois de rêves terrifiants et d’expériences personnelles douloureuses. Un site complet est consacré au Livre Rouge, il réunit éléments de présentation, extraits, images et vidéos.
L’énergétique psychique
C.G. Jung définit la notion d’énergie psychique et aborde diverses manifestations psychiques universelles : rêves, croyances, phénomènes inexpliqués…
Textes publiés en 1902, 1911 et 1948, traduits par Yves Le Lay.
Éditions Georg et Le Livre de Poche.

Correspondance C.G. Jung – Erich Neumann
Cette correspondance s’étend de 1933 à 1959, elle est d’une grande richesse et de première importance.
Les deux hommes échangent autour des problèmes liés à l’actualité immédiate – Jung résidant à Zurich et Neumann à Tel Aviv – mais avant tout interrogent les fondements du psychisme dans son immense profondeur.
L’homme à la découverte de son âme
Cet ouvrage donne une vue d’ensemble de la psychologie de C.G. Jung.
Il est majoritairement composé de conférences données par C.G. Jung dans les années 1930. Textes rassemblés et traduits par Roland Cahen.
Éditions Albin Michel.

L’homme et ses symboles
Plusieurs auteurs ont contribué à la réalisation de cet ouvrage.
Il regroupe un ensemble de textes, parmi lesquels “Essai d’exploration de l’inconscient” de C.G. Jung. Ce livre a été publié par Marie Louise von Franz, selon les directives de Jung, peu de temps après sa mort. Éditions Robert Laffont.
La vie symbolique
Sous titré Psychologie et vie religieuse, cet ouvrage regroupe plusieurs textes : les Sept Sermons aux Morts, la vie symbolique, notes alchimiques, psychologie et christianisme. Essais sur la symbolique de l’esprit et l’Âme et le Soi complètent ce volume. Traduit par Claude Maillard et Christine Pflieger-Maillard. Éditions Albin Michel.

Le Fripon divin
Paul Radin, Charles Kenényi et C.G. Jung explorent dans cet ouvrage le mythe du Fripon. Paul Radin expose ce mythe à travers un exemple puisé auprès de la tribu indienne des Winnebagos.
Publié en 1954, traduit par Arthur Reiss. Éditions Georg.

Les Énergies de l’âme
Ce livre est une retranscription du séminaire sur le yoga de la Kundalinî où Jung s’exprima aux côtés de l’indianiste Wilhelm Hauer en 1932.
Edition établie par Sonu Shamdaani, traduit par Zéno Bianu. Éditions Albin Michel.

Métamorphoses de l’âme et ses symboles
Dès sa première parution, ce livre qui marquait la rupture de Jung avec Freud fut abondamment commenté et discuté. Il ne cessa par la suite de l’enrichir et d’en affiner les vues.
Publié en 1912, revu en 1952, il comprend 300 illustrations choisies par Jolande Jacobi. Traduit par Yves Le Lay. Éditions Le Livre de Poche et Georg.

Les racines de la conscience
La conscience est ancrée par des racines dans la genèse de l’espèce, le devenir de l’être et de l’individu, et dans le cosmos de l’inconscient.
Cet ouvrage comprend des textes autour des archétypes et l’arbre philosophique. Publié en 1954, traduit par Yves Le Lay. Éditions Le Livre de Poche et Buchet Chastel.

Les rêves d’enfants
Jung réunit autour de lui un séminaire d’études et de recherches sur les rêves d’enfants âgés de 3 à 15 ans (2 tomes).
Traduit par Claude Maillard (tome 1) et Alexandra Tondat (tome 2). Éditions Albin Michel.
C.G. Jung : le divin dans l’homme
Michel Cazenave a réuni un ensemble de lettres de C.G. Jung autour du thème de la religion. Rappelons que pour Jung la fonction religieuse est constitutive de l’inconscient. Présentation Michel Cazenave. Éditions Albin Michel.

Ma vie. Souvenirs, rêves et pensées.
C’est dans sa 83eme année que Jung entreprit de raconter le mythe de sa vie auprès de sa collaboratrice, Mme Aniela Jaffé. Cet ouvrage permet de suivre le fil conducteur de la vie de Jung.
Traduit par Yves Le Lay et Roland Cahen. Éditions Gallimard

Mysterium conjunctionis
C.G. Jung, couronnant son oeuvre, présente le trésor ramené de son dialogue avec les anciens grimoires, inlassablement poursuivi au long d’un quart de siècle (2 tomes).
Avec la collaboration de Marie Louise von Franz, publié en 1956. Traduit par Etienne Perrot. Éditions Albin Michel.

Présent et avenir
La pression des masses organisées plonge l’individu dans un état de “somnambulisme infantile” où il perd sa dignité. La science qui l’ignore au profit des abstractions de la statistique légitime cette évolution. La voie indiquée par Jung pour y échapper consiste à porter le regard vers les “profondeurs” du Soi. Publié en 1957, traduit par Roland Cahen avec la collaboration de René et Françoise Baumann. Éditions Le Livre de Poche, Buchet Chastel, Denoël.

Problèmes de l’âme moderne
Plusieurs textes sont réunis dans cet ouvrage structuré en 4 parties : l’âme et l’esprit, l’homme et l’existence, la femme et le couple, la poésie et l’art. Publiés en 1929, 1931, 1934 et 1950, traduits par Yves Le Lay. Éditions Buchet Chastel.

Psychogenèse des maladies mentales
Voici un ensemble de textes qui précisent la psychogenèse des maladies mentales : la démence précoce, le contenu de la psychose, la schizophrénie …
Publiés de 1906 à 1958, traduits par Josette Rigal. Éditions Albin Michel.

Psychologie de l’inconscient
Sont présentés dans cet ouvrage la psychanalyse, la théorie de l’éros, les types d’attitude, les archétypes…
Publié en 1916, repris en 1943, traduit par Roland Cahen. Éditions Georg et Le Livre de Poche

Psychologie et Philosophie
En 1896 Jung a 21 ans et donne sa première conférence dans le cadre de l’association étudiante dont il fait partie, connue sous le nom de “Société de Zofingia”.
Traduit par Alexandra Lefaucheux. Éditions Albin Michel.

Psychologie du transfert
Le phénomène du transfert est au centre du succès ou de l’échec de tout traitement analytique. C’est pourquoi la psychologie ne peut sans dommage négliger ou contourner ce problème.
Publié en 1946, traduit par Etienne Perrot. Éditions Albin Michel.

Psychologie et alchimie
Cet ouvrage montre que dans l’alchimie, l’homme, en affrontant les énigmes de la matière, affrontait le plus souvent, et à l’époque sans guère le savoir les énigmes les plus brûlantes et les plus solennelles de son esprit et de sa vie.
Publié en 1952, traduit par Etienne Perrot. Éditions Albin Michel.

Psychologie et éducation
Dans ce volume se trouve groupé l’essentiel des travaux de Jung concernant l’éducation. Cet ouvrage concerne donc tous les éducateurs : professionnels de l’éducation ou éducateurs de nous-mêmes et de nos proches. Textes publiés en 1910, 1946 et 1949, traduits par Yves Le Lay avec la collaboration de Louis de Vos et Olga Raesvsky.

Éditions Buchet Chastel.Psychologie et orientalisme
Ce volume rassemble un grand nombre de textes rédigés par Jung qui concernent directement l’orientalisme.
Publiés de 1935 à 1960, traduits par Paul Kessler, Josette Rigal et Rainer Rochlitz.
Éditions Albin Michel.

Psychologie et religion
Cette étude permet de saisir dans sa profondeur la réalité du sentiment et de l’expérience religieuse, la place et le rôle du christianisme à l’égard des autres religions, le sens du dogme et du rite.
Publié en 1940, traduit par Marthe Bernson et Gilbert Cahen. Éditions Buchet Chastel.

Réponse à Job
Le but de ce livre est de montrer le développement historique du christianisme à travers les siècles, depuis l’époque de Job, jusqu’aux événements symboliques les plus récents.
Publié en 1952, traduit par Roland Cahen, postface d’Henry Corbin. Éditions Buchet Chastel.

Sur les fondements de la psychologie analytique
Devant une majorité de médecins thérapeutes, Jung expose les concepts qui ont trait à la psychologie analytique. Ces cinq conférences ont été données du 30 septembre au 4 octobre 1935 à la Tavisock Clinic de Londres. Traduit par Cyrille Bonamy et Viviane Thibaudier. Éditions Albin Michel.

Sur l’interprétation des rêves
Le rêve, produit de l’inconscient le plus profond qui cherche à se dévoiler, ne se comprend qu’à travers l’effort de l’âme à être reconnue. Les textes qui composent cet ouvrage sont tirés de plusieurs séminaires qui eurent lieu de 1936 à 1941. Traduits par Alexandra Tonda. Éditions Albin Michel et Le Livre de Poche.

Synchronicité et Paracelsica
Les études essentielles consacrées à la synchronicité sont incluses dans cet ouvrage. La préface du Yi King de Richard Wilhelm est incluse dans ce livre. Traduit par Claude Maillard et Christine Pflieger-Maillard. Éditions Albin Michel.

Types psychologiques
Les types psychologiques définis par Jung ont souffert de différentes interprétations et récupérations, bien éloignées des concepts précisés par l’auteur dans cet ouvrage original.
Publié en 1921, traduit par Yves Le Lay. Éditions Georg.

Un mythe moderne
Etude psychologique des soucoupes volantes où C.G. Jung met en lumière l’inadéquation de l’homme moderne à lui-même et au monde. Jung refuse de se prononcer sur la matérialité physique des faits. Publié en 1958, traduit par Roland Cahen, René et Françoise Baumann. Éditions Gallimard.

VIDEOS
Jung a vécu suffisamment tard pour que nous puissions le rencontrer en vidéo.

CARL GUSTAV JUNG (1875-1961) – Une vie, une œuvre [1985] ▶ 1:22:41
Vos complexes inconscients négatifs, Carl Gustav Jung – YouTube ▶ 34:06
Cette vidéo vous fera découvrir la découverte révolutionnaire de Carl Jung en 1913. Le premier psychiatre à …

L’alchimie à l’époque de C. G. Jung – YouTube ▶ 1:00:14

Une passionnante intervention de Frank Greiner qui replace parfaitement l’ alchimie spirituelle dans son contexte…
Carl Gustav Jung(interview) FR partie 1 – YouTube ▶ 13:07

Celui qui veut connaître l’âme humaine, n’apprendra à peu près rien de la psychologie expérimentale. Il faut lui …
Carl Gustav Jung : 1959 – dernière interview 2 ans avant sa mort …▶ 31:08

Jung reçoit un journaliste de la BBC chez lui et parle de son enfance, de sa carrière, de sa relation à Freud, de …
Interview de C G Jung sur la mort et sa croyance en Dieu – YouTube ▶ 3:54

Interview complète : Carl Gustav Jung : 1959 – dernière interview 2 ans avant sa mort – Youtube
L’archétype selon Carl-Gustav Jung – YouTube ▶ 3:15

extrait tiré du site http://www.baglis.tv et d’un entretien intitulé “Le féminin sacré” avec Michel Cazenave
L’origine du Monde selon Carl Gustav Jung avec Michel Cazenave ▶ 54:02

France Culture, “Éloge Du Savoir” du 11 janvier 2005 avec Michel Cazenave.
Le malentendu “français” avec Carl-Gustav Jung – YouTube ▶ 4:27

Le malentendu “français” avec Carl-Gustav Jung. BAGLISTV
Carl Gustav Jung FR partie 1 – Vidéo dailymotion ▶ 27:10

Regardez Carl Gustav Jung FR partie 1 – LEGRAND sur dailymotion.
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
Dubreuil
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

LE PREMIER RENDEZ-VOUS CHEZ LE PSY

Le premier rendez-vous chez un psychologue est parfois source d’appréhension, cette première rencontre peut être stressante et anxiogène pour certaines personnes. La première séance est avant tout une rencontre entre deux personnes.

Lors de cette première prise de contact, le patient exprime les raisons qui l’ont poussé à consulter et ses difficultés et sa souffrance dans sa vie actuelle. Le psychologue peut amener le patient à préciser certains éléments de son histoire ou de son contexte de vie à travers de multiples questions. Ce premier rendez-vous est important pour le psychologue afin qu’il puissent évaluer la situation et surtout pour que vous puissiez également évaluer le professionnel et poser toutes les questions que vous souhaitez sur le déroulement de la thérapie, de questionner le professionnel sur sa formation, etc.

Voici un exemple des quelques questions à éclaircir avec le professionnel lors de ce premier rendez-vous :
Quelle est la formation du psychologue ?
Quel type de thérapie pratique-t-il ?
Quelle est la durée des séances ?
Quelle est la fréquence des séances ?
Quel est le tarif des séances ?
Est-il possible d’avoir une note d’honoraires ?
Les premières séances servent à l’évaluation, le professionnel prend le temps de vous connaître et de comprendre votre situation, il définit la nature des difficultés psychologiques ou des troubles présents afin d’établir un plan thérapeutique adapté à votre situation.

Le premier rendez-vous avec le psychologue n’engage à rien
Il est important de garder à l’esprit que ce premier rendez-vous avec le psychologue ne vous engage à rien. Il est possible qu’après cette première séance de prendre le temps de réfléchir avant de s’engager dans un travail thérapeutique. Le patient comme le professionnel peuvent décider de ne pas donner suite à ce premier rendez-vous.
Les raisons pour lesquelles le psychologue décide de ne pas s’engager dans un suivi sont multiples et ne présument donc rien quant à la situation du patient. Le psychologue motive alors sa décision et prend soin d’orienter le patient vers un confrère pouvant répondre au mieux à la demande.
Quant au patient, il doit s’écouter et faire confiance à son ressenti avant de s’engager : se sent-il écouté ? Se sent-il en confiance ? Se sent-il compris ? Il est indispensable de se sentir à l’aise et de pouvoir parler librement, faites confiance à votre ressentis et à vos réactions. Il est tout à fait normal de se sentir anxieux ou mal à l’aise lors deux ou trois premières séances, néanmoins si ce malaise perdure il convient de se poser la questions si ce professionnel vous convient.

Les premiers rendez-vous sont des séances d’essai, patient et psychologue déterminerons s’ils peuvent travailler ensemble. Le contact et la qualité du lien thérapeutique jouent un rôle fondamental dans la réussite de la thérapie. Si patient et psychologue décident de s’engager dans un suivi, il reste à définir conjointement les modalités du travail thérapeutique et à aborder notamment les questions de fréquence et de durée des séances. Toutefois la durée d’une thérapie peut variée en fonction de la sévérité des symptômes.

Fréquence et durée des séances
La fréquence est adaptée aux besoins de la personne. Elle se situe en général à une ou deux séances par semaine.
durée d’une psychothérapie dépend de différents facteurs. En effet, vos besoins, les objectifs fixés, vos attentes et votre degré de motivation à intégrer et à appliquer des changements dans votre vie, peuvent avoir une incidence sur la durée de la psychothérapie. Il est important d’avoir conscience que d’effectuer des changements significatifs peut exiger du temps.
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
Dubreuil
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

DOLTO PSYCHANALYSTE

2Pour entrer dans cet apport, je n’ai pu faire autrement que de passer par une image, même si cela est inhabituel en psychanalyse.

3Il s’agit de Françoise Dolto lors d’une séance de psychanalyse avec une petite fille, manifestement psychotique [1]
[1]
Il s’agit d’une photo de Michèle Brabo. Cette photo a été…. D’abord, ce qui m’a beaucoup frappé, et qui m’avait frappé dans mon travail avec Françoise Dolto, c’est ce culot de la blouse blanche. J’étais absolument stupéfait, après les événements de Mai 68 où pour moi, et pour un très grand nombre de camarades, la psychanalyse était venue sur la base de nos engagements politiques et de cette extraordinaire espérance que ces événements avaient pu susciter – et en ce qui me concerne, dans une très grande haine du discours médical. Or, là Françoise Dolto a une blouse blanche mais aussi un tablier blanc. Cette dame, grande psychanalyste, osait donc faire des psychanalyses en blouse blanche. Tout de suite, me semble-t-il, on peut dire que la psychanalyse s’accommode mal des idéologies, y compris les plus libertaires, en tant qu’elles restent telles ; c’est-à-dire qu’il n’est pas question de remplacer l’idéologie médicale par l’idéologie psychanalytique. Ce ne serait rien d’autre qu’une nouvelle direction de conscience, ou un nouveau gouvernement des âmes. Donc, l’antimédical n’était pas une orientation mauvaise. Bien au contraire. Mais ce qui m’a frappé, c’est qu’aucune idéologie, pas même l’antimédical, ne peut remplacer l’écoute de l’inconscient. Donc, dans cette première rencontre avec Françoise Dolto, la psychanalyse subvertit le costume social qu’endosse le psychanalyste. Il n’y a pas de costume psychanalytique ; le divan lui-même n’est nullement le signe de la psychanalyse. À plus forte raison, il n’y a pas de recettes.

4Ensuite, nous voyons sur cette photo – ce que j’y vois, ce que je veux souligner pour vous – la petite fille dans cette sorte de raideur immobile, psychotique, figée dans son mouvement. Son geste est arrêté. Elle ne touche pas, elle agrippe ; elle empoigne le collier de Françoise Dolto. Telle que nous pouvons la voir dans cette extraordinaire attention et cet extraordinaire accueil qu’elle porte à cette petite fille, nous percevons que Françoise Dolto n’est nullement détruite par ce à quoi elle s’est prêtée. Je crois qu’un très grand enseignement de cette photo, c’est que Françoise Dolto n’étant pas détruite par le geste de cette enfant, en retour il y a une constitution possible de la pulsion pour cette enfant. Cette petite fille est donc entièrement « empoigner un bout de madame Dolto », qui n’en est pas détruite pour autant. Non seulement elle n’en est pas détruite, mais l’enfant y est entièrement accueillie. Françoise Dolto, par cet accueil, crée donc du transfert à ce temps mis en acte où il n’y a pas encore de différence entre le sujet et l’objet. Nous verrons cela théoriquement, mais je crois très important d’avoir d’abord, avant vos oreilles, fait appel à votre vue, c’est-à-dire pas seulement à vos oreilles savantes. Je crois que là, il y a quelque chose d’un premier enseignement doltoïen.

5Venons enfin à Françoise Dolto elle-même. Françoise Dolto est accroupie. Je ne dirais même pas qu’elle se met à la portée de l’enfant, à la même taille que l’enfant, elle se met plus bas que l’enfant. Elle prête son corps à la psychose, elle s’offre psychiquement comme support et aide transférentielle.

6Pour entamer un petit peu la question de l’apport théorique de Françoise Dolto, avant d’essayer de voir cela d’une façon un peu plus détaillée, je dirai ma lecture de ce qu’elle a apporté.

7Il y a donc d’une part cette subversion du costume dont je vous parlais. À mon sens, c’est une subversion de l’idéologie psychanalytique elle-même. Ce n’est pas que Françoise Dolto n’ait pas eu de maître ; il y a eu Lacan dont elle disait : « Tu es un maître si formidable qu’on peut te suivre, même si on ne comprend pas ce que tu dis ou même si on ne le comprend qu’après. » Ainsi, elle avait reconnu chez Lacan un maître. Par ailleurs, Françoise Dolto a eu sept contrôleurs, plus ou moins tous d’écoles différentes.

Découvrir Cairn-Pro8Donc, par-delà cette subversion de l’idéologie psychanalytique par Dolto, ce n’est pas qu’elle n’avait pas de maître, c’est que ça ne l’empêchait pas d’être la psychanalyste – je devrais dire le psychanalyste – la plus libre que j’aie jamais rencontré, la moins assujettie aux chefs, la plus dégagée des théories officielles quand ces théories ne lui semblaient pas correspondre à la vérité de ce qu’elle entendait. En fait, Françoise Dolto s’en tenait d’abord et avant tout à l’écoute de l’inconscient. Elle disait cette chose extraordinaire qui me semblait être une sorte d’idéal de tout psychanalyste : « Ce sont les enfants qui m’ont appris la psychanalyse. » Je dis un « idéal » parce que c’est quelque chose de très difficile, qui nous suggère en retour la question suivante : que faut-il avoir traversé pour pouvoir enfin apprendre de nos patients, pour pouvoir enfin les entendre ? Ce n’est pas si évident que cela, notamment dans les sociétés psychanalytiques où le souci reste d’abord et avant tout d’être conforme. C’est-à-dire qu’il y a certainement quelque chose à arracher à une double terreur : une terreur qui est celle de l’institution psychanalytique et du discours psychanalytique lui-même ; et une terreur plus obscure, plus intime. Cette terreur qui s’empare de nous et qui nous empêche d’écouter, dans cette sorte de course effrénée à trouver des outils pour faire un filtre à ce que nous aurions à entendre. Je ne dis pas qu’on écoute sans outils, mais je dis qu’il y a un temps – un temps qui peut durer – de véritable terreur subjective où nous n’arrivons pas à entendre nos patients. Cette terreur rend les thérapeutes plus pressés d’avoir une réponse que d’écouter.

9Pourquoi cela lui était-il possible ? Je n’en sais, à vrai dire, pas grand-chose, sinon quand même ceci qu’il y a l’affirmation claire – et nous la trouvons dans certains textes d’elle que je vous lirai tout à l’heure – de quelque chose qu’elle n’a pas caché, quelque chose qu’elle a plutôt montré, que tout lui venait de sa propre enfance. Elle a pu en faire un savoir qui lui permettait d’écouter les enfants et les adultes qui venaient lui parler. Ce quelque chose, il faut peut-être l’appeler une sorte de psychose infantile. Autrement dit, mais avec un profond décalage parce que ça n’arrive pas à tous les cas de psychose infantile, elle a dû être l’analyste de sa propre mère. Vous savez peut-être que quand elle était toute petite, Françoise Dolto disait : « Plus tard, je serai médecin d’éducation. »

10Il me semble que cette liberté amenait Françoise Dolto à faire des propositions qui ont très radicalement bousculé les habitudes de penser de tous, et y compris des psychanalystes eux-mêmes. La principale, à mon avis – et dans la ligne de Freud, mais plus loin que Freud –, concerne l’imputation de sujet : le fait de poser qu’il y a du sujet ou que ça n’est pas sans sujet ; que là où ça parle, ou là où ça ne parle pas, là où ça serait presque une chose ou du pas encore né, il y a du sujet. Ça va plus loin que Freud, avec une très grande portée : une portée clinique évidemment, une portée pédagogique bien sûr, mais d’abord et avant tout une portée éthique. Et c’est là, je crois, que se résume l’humanité de Françoise Dolto – dans une phrase au fond toute simple : un enfant est une personne ; il est une personne à part entière. Il comprend ce qu’on lui raconte, même quand il n’a pas encore le langage. Cela, tout le monde le dit, tout le monde le répète après elle, mais je dois vous dire que je n’avais jamais vu – et je crois n’avoir toujours jamais vu – quelqu’un se tenir à cela d’une façon aussi résolue que Françoise Dolto.

11Aussi résolue parce que ça joue sur plusieurs plans. Il y a un plan facilement accessible. Je vais vous en donner un exemple. En consultation, en séance, des enfants avec leurs parents – disons des enfants qui ont le langage – se produit un phénomène que même un non-psychanalyste peut constater : il y a des parents qui nous disent devant leur enfant ce qu’il ne faut surtout pas que l’enfant sache. Cela est dit devant l’enfant. Et c’est d’une fréquence, presque d’une banalité écrasante – écrasante pour l’enfant, évidemment. Donc ils disent devant nous ce que l’enfant ne doit pas savoir, comme s’il ne comprenait rien. Leur parole s’assortit alors d’un commandement à l’enfant non formulé, qui est de ne rien entendre de ce que ses oreilles entendent, c’est-à-dire d’être une chose. On n’est pas loin de l’assassinat d’âme dont parlait le président Schreber. Donc des enfants qui sont là assignés à une place de chose ou de prolongement des fantasmes des parents ; en tout cas pas des sujets, pas des personnes humaines à part entière. Cela, cette strate, est facile à comprendre.

12Mais pour Françoise Dolto, les choses allaient beaucoup plus loin. L’imputation de sujet, disons de personne humaine, Dolto la faisait dès le niveau fœtal. Là, nous ne sommes plus du tout dans le cadre d’enfants ayant le langage, puisque nous parlons même d’enfants non nés, d’enfants dans le ventre de leur mère. Je voudrais vous montrer comment, avec quels outils Françoise Dolto pensait et entendait, et comment elle a pu étayer avec autant de force la foi qu’elle avait dans l’imputation de sujet. Et pour vous le montrer au point pour nous le plus stupéfiant, et à vrai dire le plus énigmatique, au niveau fœtal, je vais vous lire des passages sur ce qu’elle a appelé « la castration ombilicale » – des passages assez longs pour que vous ayez une expérience sensible du style de Françoise Dolto et de sa stratégie. Je crois que c’est une citation assez paradigmatique et qu’au fond, tout Françoise Dolto est là-dedans. Cette première citation est tirée de L’Image inconsciente du corps, le livre de Françoise Dolto qui est en quelque sorte son héritage théorique. Soyez attentifs à ce que elle, elle entend ; où elle se met pour entendre, comment elle pense son affaire. Elle dit ceci [2]
[2]
F. Dolto, L’Image in-consciente du corps, Le Seuil, p. 92. : « Au lieu du sang placentaire qui alimentait passivement la vie symbiotique du fœtus dans l’organisme maternel, c’est sur l’air, nouvel élément commun à toutes les créatures terrestres, et dont la soufflerie pulmonaire entretient le flux et le reflux, que la vie charnelle se greffe, pourrait-on dire. Avec cette soufflerie apparaît la modification du rythme pulsatile cardiaque qui n’est plus pendulaire, mais qui est à présent rythmé, comme l’était, dans la vie fœtale, le cœur au rythme ondulatoire de la mère. Oui : l’enfant nouveau-né a perdu, en naissant, l’audition de son propre rythme cardiaque tel qu’il le connaissait. » Voilà avec quoi Françoise Dolto entend, c’est-à-dire qu’elle s’identifie au fœtus. Nous aurons l’occasion de revenir sur la pratique analytique de Dolto, sur cette identification de Dolto. Je poursuis : « Apparaît aussi la sensation de la masse du corps, soumise à la pesanteur, et des modalités de manipulation dont elle est l’objet de la part des mains qui l’accueillent ; et le plan du lit ou le corps de la mère sur lequel l’enfant repose. La lumière éblouit sa rétine, l’odeur de sa mère emplit son cavum, les voix de l’assistance et les bruits se font entendre clairement, alors que jusque-là les sonorités du monde n’étaient perçues qu’à travers cette paroi d’eau et de chair, sur ce fond où le rythme pendulaire rapide du cœur fœtal se croisait avec le rythme plus lent de deux temps et demi du cœur maternel », etc. La suite montre l’irruption d’un tout autre champ, et au même moment, c’est-à-dire de façon absolument conjointe – et c’est essentiel –, dans la pensée et le travail de Françoise Dolto : « Brusquement, brutalement, il découvre des perceptions dont il n’avait pas notion jusqu’alors : lumière, odeurs, sensations tactiles, sensations de pression et de pesanteur, et les sons forts et nets qu’il avait sourdement perçus jusqu’ici. » Nous sommes encore dans le même registre, mais elle ajoute : « L’élément auditif le plus marquant va, par sa répétition, être celui de son prénom, signifiant de son être au monde pour ses parents. Signifiant de son sexe également, car c’est la première chose qu’il entend : “C’est un garçon !” “C’est une fille !”, et les paroles qui ont aussitôt fusé des assistants, et les voix des familiers qui l’accueillent, les voix qui s’approchent… »

13C’est très intéressant parce qu’il y a un lien entre la voix, c’est-à-dire l’objet, et le signifiant, c’est-à-dire la signification, le sens garçon, fille, etc., tout cela est conjoint, engrené, tout un pour Dolto. Je reprends : « Ce prénom et cette qualification, la qualification de son sexe, sont lancés par des voix animées dans la joie ou dans la réticence [donc là, c’est ce qui passe par la voix, par l’objet] disant la satisfaction ou non de l’entourage, et nous découvrons chaque jour combien les nourrissons gardent “engrammées” comme des bandes magnétiques, quelque part dans leur cortex, ces premières significations de joie narcissisante, déjà, ou de réticence, sinon de peine, et d’angoisse pour eux dénarcissisante, déjà. » Puis, phrase soulignée par Françoise Dolto : « C’est le langage, donc, qui symbolise la castration de la naissance que nous appelons la castration ombilicale. »

14Nous sommes quand même dans l’embarras, mais, relevons-le, elle finit tout ce chapitre en nous disant : c’est le langage qui symbolise la castration ombilicale. Seulement vous avez pu entendre que ce n’est pas si évident que cela. Il y a bien d’autres choses avec lesquelles elle appuie son écoute, puisque ça va même pour elle jusqu’à s’identifier à ce que peut être un fœtus. Je crois qu’on pourrait presque s’en tenir à cette seule citation et en parler entre nous sans cesse ce soir ; on aurait déjà les grandes lignes de ce que je vais essayer de déplier un petit peu.

15Donc, la fonction du langage est tout de suite la référence symbolique et, résultat immédiat, résultat de praxis, on va du même coup parler au nourrisson, et même au fœtus puisque le langage est là d’emblée. Évidemment, je ne me masque pas ce que cela peut avoir de stupéfiant, voire même de carrément délirant pour certains. Le fait est que ça se confirme cliniquement, puisque l’interprétation ainsi éclairée par ce précepte doltoïen guérit. Mais ce n’est pas une preuve. Le fait que quelque chose guérit n’est pas une preuve du bien-fondé d’un concept, ni une preuve qu’on sait exactement ce qui a fonctionné dans ce qui a guéri. Donc, pour ma part, je laisserai à chacun trancher l’énigme : est-ce que les fœtus comprennent ou non ce que l’on raconte ? Quoi qu’il en soit, délire ou pas, une chose est sûre, c’est qu’ils comprenaient Françoise Dolto. C’est, à mon avis, ce qui nous importe le plus aujourd’hui.

16Les nourrissons ou les fœtus comprennent-ils n’importe qui ? Je n’en sais rien. En tout cas, ils comprenaient Françoise Dolto. Disons que Françoise Dolto parlait nourrisson. Elle parlait nourrisson ou même, éventuellement, plante verte, c’est-à-dire ce qui est le plus régressé que l’on puisse imaginer. Or ce talent, ou ce don, elle l’exerçait sans aucune complaisance pour le régressé. D’où, nous le verrons plus loin, l’importance pour elle dans son édifice clinique et théorique de ce qu’elle a appelé « les castrations » ; les différentes castrations – orale, anale, ombilicale, etc. – pensées par elle comme castrations symboliques et symboligènes. Ce qui veut dire que, certes, Françoise Dolto communiquait avec ce qui est régressé, mais sans complaisance pour la régression. Ce qui oppose de façon radicale Françoise Dolto aux adultes fascinés par les tout-petits qui se trouvent ainsi pervertis par cette fascination des adultes. Il ne s’agissait nullement pour Françoise Dolto de jouir de l’archaïque à travers l’enfant psychosé. Pour Françoise Dolto, il s’agissait d’aller le chercher là où il est pour lui rendre possible la vie dans la communauté des humains. Cela m’apparaît vraiment comme un point clé de l’univers théorique et pratique de Françoise Dolto.

17Cela allait assez loin du reste, parce que dans les cures où nous avons affaire à des enfants qui ont été plus forts que la mort, qui ont subi des assassinats d’âme tellement terribles ou des maladies somatiques gravissimes et qui en ont réchappé, elle nous donnait le conseil d’être d’autant plus intransigeants dans la conduite de la cure et dans le maniement du transfert ; elle disait que ces enfants plus forts que la mort avaient de très grands risques de se pervertir, et qu’une des tâches essentielles de l’analyste, c’était d’empêcher cela. Je l’ai vue assez féroce dans ce travail-là.

18Le fait que, dans ce texte, Françoise Dolto s’identifie au fœtus nous permet d’insister sur l’importance du sensoriel chez elle. Et c’est peut-être là que nous sommes très directement dans un champ qui déborde de très loin le simple cadre de la psychanalyse d’enfants. Monique Tricot le montre clairement quand elle évoque les cures où il s’agit d’incarner ou de constituer sur nous le grand Autre, en faisant appel à notre propre vécu sensoriel. C’est une phrase tout à fait forte, et assez inhabituelle. Il faut avoir travaillé avec des psychotiques pour sentir cette nécessité de passer par là. Et c’est encore mieux d’avoir le soutien de Françoise Dolto et d’autres pour s’appuyer là-dessus. Je voulais reprendre ça, parce qu’elle a réhabilité le sensoriel dans la psychanalyse. Cela me semble très important et explique, à mon avis, sa stratégie avec la psychose.

19Ce qu’elle en dit me touche énormément parce qu’au fond, sa stratégie, c’était de ramener la psychose à de la phobie, à ce qu’elle appelle « état phobique » – ce n’est pas tout à fait pareil. Je crois qu’il s’agissait dans son travail avec les psychotiques d’ombiliquer la psychose sur la constitution d’un objet phobique. Cette stratégie – qui évidemment était conforme à ce que Françoise Dolto était elle-même, elle ne pouvait travailler qu’avec un outil à sa main, ce qui était elle-même – est très intéressante quand nous travaillons dans des lieux où travaillent également des psychomotriciens. J’ai pu constater, avec ceux qui font de la relaxation pour des enfants psychosés, que la relaxation pour la relaxation n’a évidemment aucun intérêt, parce que si le monstre ou l’espace sans nom se trouve par exemple au creux de la main ou de l’avant-bras, on comprend pourquoi il reste crispé et que l’enfant va se replier sur cet espace-là ; il ne va certainement pas, pour les beaux yeux des psychomotriciennes, le laisser se déplier, parce qu’il faut qu’il défende sa peau, si j’ose dire. Mais si, justement, dans ce travail de psychomotricité, on propose à l’enfant un accueil et une écoute de ce qu’il pourrait dire, si on travaille aussi sur les éléments signifiants qui surgissent au moment où on travaille avec lui sur ce bras refermé en protection de cet espace sans nom, il est certain que l’on peut tout à fait être aidé par cet abord de Dolto de prendre la psychose comme une phobie.

20Je vous lis ce qu’elle en dit : « La phobie, c’est la menace de dissociation qui pèse sur l’image de base du corps […]. Je crois que ce que nous appelons psychose, c’est très souvent de la phobie. Nous appelons psychose un ensemble de processus de défense pour essayer de ne pas souffrir du péril grave que signifierait la perte du lien entre l’I-ma-ge (“ici-moi-je”) et mon corps. Au début de la vie, au plus près du lieu de réunion des pulsions de vie, aux sources de la vie dans l’espace du corps, il y a le danger de dissociation. Je crois que c’est ce danger qui est à l’origine des dits “psychotiques” que nous devrions considérer en réalité comme des gens en prise avec une phobie qui envahit tout contact avec autrui […]. Quand certains considèrent tel ou tel patient “psychotique”, ils décident du coup de ne pas le prendre en traitement ; désormais, la peur et le sentiment que le traitement ne servira à rien conduisent à abandonner toute tentative d’écoute de ces enfants. » Et elle ajoute alors cette chose extraordinaire : « Je crois que c’est en fait une résistance du thérapeute qui n’a pas touché en lui-même le noyau psychotique et qui n’a pas compris que le psychotique est quelqu’un qui se défend et défend son image de base [3]
[3]
F. Dolto, L’Enfant du miroir, Rivages, p. 18.. » Je vous demande de garder en mémoire cette dernière phrase que nous verrons plus tard, quand nous essayerons de déplier la question de l’enseignement de Françoise Dolto.

21J’ai, tout à l’heure, dans ma lecture du texte précédent, tenté de vous montrer deux axes : d’un côté le sensoriel, le phénoménologique, et de l’autre ce qui serait plutôt du côté du signifiant, du symbolique ou de la théorie du signifiant ; donc, une sorte d’angle ouvert par ces deux branches. Mais je crois que, en ce qui concerne Françoise Dolto, il serait plus juste de dire que pour elle, de fait, le sensoriel et le symbolique ne sont nullement indépendants ; que d’une certaine façon ils ne font qu’un, et c’est ça qui fait le fond du concept majeur qu’elle nous aura laissé, qu’elle a appelé « l’image inconsciente du corps ». Je crois que ça, c’est son legs en tant que théoricienne, et puis peut-être aussi en tant que clinicienne. Ce concept d’image inconsciente du corps, c’est éminemment paradoxal. Elle-même a beaucoup été interrogée là-dessus. On lui a demandé notamment pourquoi elle tenait tellement à appeler ça « image ». Elle a cherché à s’en sortir par toutes sortes de moyens ; elle disait : « Oui, je ne peux pas ne pas appeler ça image, je ne sais pas pourquoi. » Première ligne de défense. Deuxième ligne de défense : « Écoutez, ce n’est pas très important, ce qui compte, c’est que ça soit inconscient et que c’est symbolique. » Mais enfin, c’est quand même « image » ! Elle a tenté des choses plus scabreuses encore – je vais vous en lire un petit bout. Elle s’en sort par un jeu de mots : « Ces identités sont ici constituantes du mot image : la première lettre “I” du terme “identité” ; le “ma”, première syllabe du mot “maman” que l’enfant prononce toujours précédé du “ma maman” et suivi du “ma maman m’aime” (homophonie avec l’adjectif indéfini “même” qui marque l’identité absolue). Et enfin le “ge”, dernière syllabe du mot “image”, qui signifie la terre, la base ou encore le corps, voire le “Je”, pronom personnel de la première personne du singulier. Voilà [dit-elle, comme si elle avait argumenté de façon implacable] : I-ma-ge, c’est-à-dire substrat relationnel à l’autre [4]
[4]
F. Dolto, L’Enfant du miroir, op. cit. p. 13.. »

22Pour ma part, je ne suis pas tout à fait convaincu et satisfait par cette ligne de justification. Peut-être qu’on peut dire déjà, comme première indication que nous reverrons tout à l’heure, que pour Lacan « l’image inconsciente du corps » de Dolto, c’était, nous a-t-il dit, un signifiant. Ce qui est très intéressant, non pas pour comprendre ce que veut dire « image inconsciente du corps » chez Dolto, mais plutôt pour comprendre ce que veut dire le signifiant chez Lacan. Parce que si Lacan dit que l’image inconsciente du corps de Dolto, c’est un signifiant, nous voyons que pour Lacan, le terme même de « signifiant » a une acception inhabituelle pour la linguistique.

23Quoi qu’il en soit de ce débat, le sensoriel chez Françoise Dolto est au service de la prééminence du symbolique, et c’est ce qu’elle va amener avec une chose pour laquelle elle a été d’une absolue intransigeance dans la direction de la cure, et qu’elle a appelée « les castrations ». La castration symbolique de Dolto, c’est véritablement l’axe de la cure, son orientation. Je vais vous en lire quelques passages pour vous faire bien entendre, non pas tant ce dont il s’agit que les difficultés du maniement de ce concept, et pourquoi et à quelle difficulté clinique cela correspondait chez Dolto.

24« Toute ma recherche concernant les troubles précoces de l’être humain s’applique à décoder les conditions nécessaires pour que les castrations données à l’enfant au cours de son développement lui permettent l’accès aux sublimations et à l’ordre symbolique de la loi humaine. C’est cet ordre symbolique qui promeut tel spécimen humain, né d’homme et de femme, doué d’un corps masculin ou féminin, à devenir sujet responsable […]. C’est grâce à la castration que la communication subtile, à distance des corps, devient créatrice, de sujet à sujet, par la communication, à travers l’image du corps actuel et le langage, au cours de chaque stade évolutif de la libido [5]
[5]
F. Dolto, L’Image inconsciente du corps, op. cit., p. 82.. »

25Je ne vais évidemment pas vous donner des exemples de toutes les castrations, mais parlons un peu de la castration orale. Ceci va illustrer ce qui est en jeu pour Dolto dans cette affaire de castration.

26« Le sevrage du sein, par exemple, sépare l’enfant de sa mère comme nourriture substantielle, en séparant la bouche de l’enfant du sein lactifère. Mais le sevrage, première castration orale, ne vise qu’une modalité de satisfaction du désir, en tant que partiel. La tactilité, l’odeur, le corps-à-corps pour le biberon ou l’alimentation à la cuiller et la boisson au verre demeurent ; la mère demeure objet total de la relation qu’a l’enfant avec elle. Il est vrai que ce sein maternel, au moment où l’enfant pour la dernière fois le tète, ce sein qui est un objet partiel de son désir (en même temps qu’un médiateur de son besoin), ce sein qui fait partie de la mère, est appréhendé par l’enfant comme lui appartenant à lui. Il est donc séparé d’une partie de lui-même, bien sûr illusoire, mais cela, c’est par sa survivance à cette épreuve qu’il en fait l’expérience, et cette expérience est symboligène selon la façon dont la mère rend le sevrage promotionnant dans leur relation langagière, de tendresse et d’intercompréhension. »

27Un peu plus loin : « Profitons-en pour remarquer que, pour que les castrations puissent avoir leur valeur symboligène, il est nécessaire que le schéma corporel de l’enfant se trouve en mesure de les supporter […]. Un enfant qui n’a pas été encore assez avec le corps de sa mère n’est pas capable de supporter le sevrage, sans régresser aux stades les plus précoces des premiers jours de sa vie. Il y a le juste moment pour apporter chaque castration, ce moment, c’est celui où déjà les pulsions, celles qui sont en cours, ont apporté un certain développement du schéma corporel qui rend l’enfant capable d’aménager ses plaisirs autrement que dans la satisfaction du total corps-à-corps […]. Le sujet qui, sans doute, est présent dès la fécondation ne se manifeste que par des désirs. Ces désirs ne peuvent pas se séparer immédiatement de leur conjonction avec les besoins. C’est le langage, au sens large du terme et au sens plus précis de paroles, qui constitue la médiation de ces évolutions que sont les castrations surmontées [6]
[6]
F. Dolto, ibid., p. 85-86.. »

28Je passe, pour en venir à une dernière citation : « Avant qu’il soit absolument assuré sur les nouvelles modalités culturelles acquises, il est dangereux pour un enfant de regarder en arrière et de s’identifier à son lui-même d’autrefois [7]
[7]
F. Dolto, ibid., p. 88.. »

29Vous voyez qu’il y a plusieurs dangers. D’abord, castration symboligène ne veut pas dire sauvagerie, il y a un temps pour cela, il y a un temps de légitime satisfaction donnée à la pulsion, ce qui est extrêmement freudien. Le danger est donc double, mais toujours finalement, pour Dolto, il y a une responsabilité des parents : que l’enfant soit castré trop tôt ou trop tard, c’est-à-dire laisser l’enfant se satisfaire trop longtemps ou le laisser trop retourner à une satisfaction dépassée, est dangereux. Cela doit être entendu avec certaines réserves parce qu’en fait, c’est une problématique secondaire qui ne rend pas compte du vif de sa pratique, qui opérait avant tout avec l’inconscient de l’enfant, plutôt qu’une pédagogie adressée à des parents rendus responsables de sa pathologie.

30Il y a donc des castrations mauvaises parce qu’elles surviennent trop tôt. Et que veut dire trop tôt pour Françoise Dolto ? Trop tôt veut dire que le schéma corporel n’est pas assez développé, et que si le schéma corporel n’est pas assez développé et que, pour des raisons éducatives ou autres, nous exigeons une castration à ce moment-là, nous fabriquons, dit-elle, une mutilation de l’image du corps.

31Il faut donc préciser ce que c’est que l’image du corps et le schéma corporel. Nous reviendrons tout à l’heure sur l’image du corps. Je dis un petit mot sur le schéma corporel. Qu’est-ce le schéma corporel, qui n’a rien à voir avec l’image du corps ? Le schéma corporel n’est pas l’affaire des psychanalystes. Le schéma corporel, c’est quelque chose de tout à fait lié à l’anatomie et à la réalité de cette anatomie, c’est-à-dire qu’il dépend, par exemple, des invalidités d’une personne. Le schéma corporel, c’est ce dont s’occupe l’ergonomie – c’est-à-dire cette discipline qui calcule l’espace et la taille des appartements, l’organisation des maisons ou la hauteur des bureaux ou des wagons pour qu’ils conviennent bien au corps et aux gestes des humains, quand on prévoit des chaises ou des tables ou des meubles, pour que la main aille assez facilement là où elle doit aller sans se contorsionner, etc. C’est de schéma corporel qu’ils s’occupent, et vous voyez bien que ce n’est nullement l’affaire du psychanalyste. Nous reviendrons plus tard sur l’image du corps proprement dite.

32Il y a aussi les castrations trop tardives, qui sont dues à la perversion d’adultes enfantins ou incestueux ; puisque au fond, il faut bien dire que, pour Françoise Dolto, l’inceste, c’est toujours celui des parents.

33Il y a donc là encore une nouvelle indication d’un double mouvement chez Françoise Dolto. Et cela justifiera à mon sens le dispositif que Françoise Dolto avait mis en place, dispositif unique à ma connaissance, de transmission de la psychanalyse à sa consultation à l’hôpital Trousseau.

34Comment retrouve-t-on ces éléments-là dans la pratique, c’est-à-dire dans la cure ? Là encore, deux axes.

35Le premier est l’anamnèse, le travail sur l’anamnèse. Insister, comme Françoise Dolto le fait, sur les percepta, sur la sensibilité, sur la sensorialité, mène forcément vers une étiologie traumatique dans l’abord des troubles que nous avons à traiter. Cette voie-là, cette pente-là de Dolto est assez proche de ce que Freud avançait dans un article qui est, je crois, son testament, Analyse avec fin et analyse sans fin, où il discute énormément cette question du traumatisme et où il finit par adopter une position étonnamment pragmatique, puisqu’il dit à peu près ceci : l’analyse avec fin, c’est l’analyse où l’on trouve un trauma ; et l’analyse sans fin, c’est l’analyse où il n’y en a pas. Seulement, quand il dit qu’il y a trauma, ce n’est pas un trauma comme cette espèce de scène dont il a réussi à faire rendre gorge l’homme aux loups, que ça se soit vraiment passé comme ça avec la bonne, etc. Non, ce qu’il appelle un trauma, c’est trouver un trauma ou construire un trauma plausible. Formulé d’une façon plus moderne ou mieux adaptée à nos oreilles, c’est agencer les conditions d’une origine plausible du trauma.

36Mais attention, parce que si nous avons bien entendu ce que nous a dit jusque-là Françoise Dolto, c’est évidemment loin d’être suffisant. C’est absolument insuffisant en soi de nommer l’événement, ou un événement plausible en cause : il faut encore le faire d’une façon qui soit audible, et qui soit même audible pour celui qui est hors langage… Vous voyez que la question se complique dans la fameuse étiologie traumatique ! Nous sommes aux antipodes d’une interprétation mécaniste où l’on va « mettre des mots dans la cure ». C’est très gentil, mais c’est comme les couches de Ripolin, ça ne fait absolument rien ; on a enfin trouvé le trauma, voilà, on le lui dit et puis ça va repartir ! Évidemment, il n’en est rien. Et la preuve que ce n’est pas ça qui est opérant, que toute son intelligence sensorielle était essentielle pour Dolto, est que son travail d’anamnèse était bien différent de ce que vous avez l’habitude d’entendre sous ce terme. Le travail d’anamnèse était d’une grande minutie ; ça l’amenait, par exemple, à aller jusqu’à demander qui habitait dans l’appartement, à faire faire le plan de l’appartement quand il y avait quelque chose qu’elle ne comprenait pas, ou bien convoquer quelqu’un qui aurait eu le souvenir de ce qui s’était passé dans la famille à tel âge, etc. Pourquoi ? Parce que Françoise Dolto ne s’avouait jamais battue. Quand elle n’entendait pas, quand ça n’allait pas, elle se disait : « Je suis passée à côté de quelque chose. » Et elle cherchait. Mais est-ce qu’elle pensait que les résultats de cette recherche, c’était ça le travail avec l’enfant ? Eh bien, pas du tout. Et la preuve en est que ce travail d’anamnèse, elle le faisait faire par quelqu’un d’autre. C’est-à-dire que pour les enfants qui étaient suivis à Trousseau, il y avait un énorme travail d’anamnèse qui était fait par une psychologue avant que l’enfant rencontre Dolto. Donc, c’est vous dire que la recherche d’un éventuel trauma est un outil indispensable pour la cure, mais n’est pas elle-même la cure. Comprendre ce qui a pu être traumatique est une chose, la nomination du trauma dans la cure en est une autre. L’anamnèse était indispensable surtout à Dolto pour élaborer des « constructions ». C’était une analyste qui ne cessait d’échafauder des constructions – ce qui, du reste, la gênait dans la cure des adultes névrosés.

37Donc, par rapport à cet axe de l’anamnèse, il nous faut bien poser quelque chose que je ne sais pas appeler autrement que la question de la communication. Est-ce cela, la communication ou la possibilité de Françoise Dolto de communiquer avec les enfants ou les bébés, qui était réellement thérapeutique, plutôt que ce soi-disant trauma, ou ce que Françoise Dolto élevait au rang de trauma dans la cure ? Forcément les deux, à condition qu’ils soient intriqués. Pour vous le montrer très brièvement, je vais vous lire un fragment de séance de Françoise Dolto dans un de ses premiers livres, Le Cas Dominique ; cette rencontre ahurissante entre ce petit garçon et Françoise Dolto – je dis « ahurissante » parce que c’est véritablement dès les premiers mots qu’ils échangent entre eux. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ça parle. Ça y va très vite. Première séance :

38« Je me présente » – à bon entendeur salut, parce que nombre de thérapeutes ou de psychanalystes ne se présentent pas ; ils sont à leur fonction, comme disait François Perrier : « Fonctionnaire de l’inconscient patenté à son fauteuil. » Elle, elle se présente : « Je me présente et lui demande s’il a quelque chose à me dire pour m’expliquer comment lui-même se sent. Il dit avec son sourire angoissé, figé : “Voilà, moi je ne suis pas comme tout le monde, quelquefois en m’éveillant, je pense que j’ai subi une histoire vraie.” (Ce sont, rigoureusement transcrites, ses premières paroles à mon endroit.) Je lui dis : “Qui t’a rendu pas vrai.” »

39« Lui. – Mais c’est ça ! Mais comment est-ce que vous savez ça ?

40« Moi. – Je ne le sais pas, je le pense en te voyant.

41« Lui. – Je pensais me retrouver dans la salle quand j’étais petit, je craignais les cambrioleurs, ça peut prendre l’argent, ça peut prendre l’argenterie. Vous ne pensez pas tout ce que ça peut prendre ?

42Il se tait. Je pense en moi-même : la salle, ne serait-ce pas la « sale » ? Je dis : « Ou bien ta petite sœur. »

43« Lui. – Ah ! vous alors, comment est-ce que vous savez tout ?

44« Moi. – Je ne sais rien d’avance, mais c’est parce que tu me dis avec tes mots de choses et que je t’écoute de mon mieux ; c’est toi qui sais ce qui t’est arrivé, pas moi. Mais ensemble, on pourra peut-être comprendre [8]
[8]
F. Dolto, Le Cas Domi-nique, Le Seuil, p. 33.. »

45Je laisse de côté la question que lui pose Dominique : « Comment tu sais ça, toi ? » On a peut-être une petite idée de comment ça se fait que Françoise Dolto savait cela. Mais j’en retiens pour le travail de ce soir que, quoi qu’il en soit, il n’y a absolument aucun doute que l’élément primordial pour Françoise Dolto c’est le corps, mais dans l’affirmation acharnée que le corps est langage. Tout est langage, même s’il s’agit d’un langage non verbal. Tout, pour elle, fait message pour du sujet supposé ; et ce sujet est supposé là dès le début, puisque, comme c’était indiqué dans le passage que je vous ai lu tout à l’heure, il est supposé dès la fécondation.

46J’en viens – puisqu’il faut quand même s’y atteler – à la question de l’image inconsciente du corps. Dernièrement, j’ai lu un article d’Hervé Petit dans une revue récente, où il dit vraiment en toutes lettres que l’image du corps pour Dolto, au moins au départ, ce n’est pas un concept. C’est bien mon avis. C’est presque un truc pour rentrer en communication avec ceux qui n’ont pas encore le langage parlé, ou qui n’ont pas de langage parce que trop régressés : les psychotiques. Pour vous montrer ce qu’est ce concept de l’image inconsciente du corps, il me semble qu’aucune considération théorique ne serait bienvenue. Il vaut mieux que je vous lise quelque chose qui pourrait parler à vos images inconscientes du corps à vous, un extrait d’une interview qu’elle a donnée. Voilà ce qu’est ce fameux concept si étrange, mais vous allez voir qu’au fond, c’est extrêmement simple ; extrêmement simple, mais faramineux. C’est l’histoire d’une gamine qu’elle a eue en analyse :

47« C’était une fille qui ne savait plus qu’elle avait des mains, ni que les mains étaient des orifices oraux et anaux. » Vous voyez qu’on est loin du schéma corporel ; là, l’image du corps, ce n’est pas celle des ergonomistes. On est dans un autre espace. « Rappelez-vous qu’au stade oral l’enfant déplace l’oral partout, et ce sont précisément les mains qui comme une bouche savent prendre, lâcher et parler. C’est pour cette raison qu’en lui tendant la pâte à modeler pour qu’elle la saisisse, je lui ai dit : “Tu peux la prendre avec ta bouche-de-main.” Elle a bien réagi en la prenant précisément avec sa main et en la portant à sa bouche. Tu imagines combien cela aurait été différent si je l’avais invitée à prendre l’objet en lui formulant : “Prends la pâte à modeler dans ta main”, ou : “Fais quelque chose avec du modelage.” Ces mots seraient restés vides de sens et n’auraient provoqué aucun effet. Tandis qu’à travers la phrase : “Prends avec ta bouche-de-main”, je lui ai mis une bouche dans sa main, comme si ma parole était un raccord entre sa bouche et sa main. » C’est magnifique.
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Dubreuil
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

« Le rapport du schéma corporel et de l’image du corps est constitué par une foule d’intrications pulsionnelles […]. En lui disant : “Tu peux la prendre avec ta bouche-de-main”, je lui ai procuré la médiation fantasmée de la bouche, comme si en lui réveillant la bouche, elle pouvait faire usage du bras. Elle ne savait plus déglutir comme un enfant sain. Je me rappelle qu’elle mettait l’aliment dans sa bouche en le faisant disparaître à la manière dont les serpents ingèrent un objet sans faire les mouvements inhérents à la déglutition. C’est un phénomène qu’on observe très fréquemment chez les enfants anorexiques. Écouter ces enfants signifie leur parler au niveau des images du corps, comme s’ils étaient aussi intelligents que moi. » C’est formidable, non ? Alors que ce qu’on entend, c’est l’effort de Françoise Dolto pour être aussi intelligente qu’eux ! « Il est absolument inutile de leur dire : “Tu ne veux pas avaler” ; au contraire, il faut parler à l’image du corps en leur disant : “Tu refuses d’avaler parce que ça s’arrête à l’endroit de ton pharynx.” C’est comme ça que je parle aux bébés. Je communique au niveau de leurs images du corps [9]
[9]
F. Dolto, L’Enfant du miroir, op. cit., p. 22, 23, 24.. »

49Bien sûr, c’est du côté du concept, mais c’est aussi éminemment du côté de la clinique. Je crois que c’est quelque chose qui se tient entre les deux.

50J’avancerai ici deux remarques. La première – j’essayerai, si j’ai le temps, de conclure là-dessus –, c’est que Françoise Dolto est particulièrement fondée à éclairer pour nous la question : « Qu’est-ce que c’est qu’un sujet, dès lors qu’il est incarné dans un corps ? » L’inconscient est ce qui, dans la communication parlée, échappe au dire. L’indicible tient à ce que la fonction symbolique doit au corps. Nous avons donc absolument une nécessité dans la cure à avoir recours à l’émotion, à la perception, à l’affect. Deuxième remarque : l’image inconsciente du corps, c’est ce qui du corps, comme pré-sujet, n’est pas de l’organique fonctionnel. C’est bien pourquoi nous avons là un décalage sérieux par rapport à la question du trauma et par rapport à cette psychanalyse naïve ou cette psychothérapie naïve, tout travail qui viserait à dire : on va simplement mettre des mots comme ça, au sens de : on va mettre des explications et une origine aux troubles. Ce n’est pas du tout ça ; c’est que le symptôme, bien loin de l’étiologie traumatique – et au fond, l’anamnèse, le trauma, il était nécessaire à Françoise Dolto pour travailler, pour s’identifier, mais elle, ce qu’elle dira, c’est que le symptôme provient d’une infirmation ou d’une mutilation de l’image du corps, et donc d’une déliaison entre le corps (schéma corporel) et l’image du corps.

51J’en reviens à notre embarras de tout à l’heure, parce que ceci, d’où le tenait-elle ? Eh bien, elle nous a donné une réponse. Il faut en passer par sa propre psychose. Je crois que ça, c’est ce qui a fait que Françoise Dolto et Jacques Lacan, qui s’appelaient respectivement l’un l’autre « grand dragon » et « petit dragon », soient restés aussi fidèles l’un à l’autre en amitié. Je crois me rappeler cette confidence d’une voisine de Lacan à un congrès ; alors que Françoise Dolto parlait, Lacan s’est penché vers cette personne et lui a dit : « C’est incroyable ce qu’elle raconte cette bonne femme. Je ne comprends rien de ce qu’elle raconte, mais c’est exactement la même chose que ce que je dis. » Je crois que c’est profondément vrai, et je crois même que la tentative pour Lacan de fonder, d’asseoir la formation du psychanalyste sur ce qu’il a appelé la « passe », c’était de tenter ce pari inouï d’inscrire la dimension de la psychose dans la cure de l’analyste, au cœur de la formation du psychanalyste. Pourquoi ? Parce que la dignité de la psychanalyse, c’est de répondre du fait psychotique. Et que si la psychanalyse ne répond pas du fait psychotique, à terme elle ne sera rien de plus qu’une petite mode vaguement thérapeutique d’une époque donnée qui tombera, comme toutes les choses qui n’ont qu’une mode, en désuétude.

52Est-ce que ça se transmet, ça ? Ce n’est pas évident ; parce que si c’est lié à son enfance, etc., est-ce que ça se transmet ? Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que tous ceux qui ont voulu purement et simplement copier Françoise Dolto ont produit des catastrophes. Elle-même était très fâchée de cela ; elle l’a dit, notamment dans un article de la revue Patio où elle a parlé du contrôle, où elle disait du reste que c’était la seule fois de sa carrière où elle avait été amenée à parler du contrôle [10]
[10]
Patio n° 2, « Direction de la cure », Evel, p. 55.. Elle disait : je suis désespérée parce que – et c’est probablement dû à quelque chose de ma façon d’enseigner – les gens me copient. Évidemment, il ne s’agissait absolument pas de la copier – plutôt de s’en inspirer.

53Donc, pas de recette, n’est-ce pas ? Pas de transformation de la psychanalyse en pédagogie. Et pourtant, quelles auront été les facettes de l’enseignement de Françoise Dolto ? Qu’est-ce qu’elle nous laisse ? S’il s’agit d’avoir affaire à l’enfant psychosé en soi, c’est intransmissible, sinon indirectement. Indirectement elle l’a fait, puisqu’elle n’était pas avare de donner à entendre son inconscient, ou de démailler tout ce qu’elle pouvait nous dire de comment elle faisait avec ses propres enfants. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle n’était pas coincée, Françoise Dolto. Elle montrait clairement d’où lui venait ce qu’elle savait, puisque tout pour elle avait commencé enfant, notamment, disait-elle, dans ses difficultés avec sa mère. De ce fait, j’ajouterais qu’elle démontrait qu’elle était – et qu’elle avait été – l’analyste de sa propre analyse. Il y a donc cette dimension-là.

54Il y en a d’autres. Il y a celle que j’évoquais, ce legs théorique qui est la théorie de l’image inconsciente du corps. Mais si ce concept rend compte de ce que Françoise Dolto effectuait, il est bien loin de l’effectuer de lui-même. Comment s’en servir ? Peut-être – comme je l’ai fait tout à l’heure en vous lisant cette histoire de la bouche-de-main – parce que ça peut vous faire ce que ça m’a fait, c’est-à-dire de débloquer ce qui en vous peut, avec les enfants ou les adultes que vous avez à entendre, communiquer à ces stades très précoces, ou à ces lieux si régressés.

55Mais ce n’est pas là tout l’enseignement de Françoise Dolto. C’est aussi un enseignement direct, mais, je dois dire, très peu académique. Je vais vous lire quelques-unes de ses recommandations. Si seulement nous pouvions pratiquer comme elle nous le conseille là !

56« Ceux qui postulent de devenir psychanalystes d’enfants croient souvent que c’est plus facile que de s’occuper des adultes. C’est beaucoup plus difficile parce qu’on a tendance à entendre ce que l’on veut entendre et pas ce que les gens disent. » Cela dit, je ne vois pas vraiment la différence avec la psychanalyse d’adultes ! « Je les invite à aller dans un square ou un jardin public, un jour de congé, et je leur dis sur place [voilà l’enseignement de Françoise Dolto : tout le monde va au square] : “Je veux que vous remplissiez un cahier ; vous allez vous asseoir dans un coin, vous faites comme si vous lisiez un livre, et puis vous écoutez tout ce que se disent les enfants entre eux, ce que disent les mères aux enfants, ce qui se passe dans les groupes de femmes et d’enfants, sur les bancs, vous notez tout ça, que je voie si vous êtes capables d’observer, pas d’observer avec les yeux – ceux qui zieutent, interprètent ce qu’ils voient. Écoutez les paroles que disent les enfants, exactement, pas en corrigeant ce que vous voudriez avoir entendu. Les formes grammaticales les plus erronées, quelles qu’elles soient. Vous notez mot à mot ce que les enfants se disent entre eux quand ils jouent sur le banc à côté, les adultes quand ils voient leurs enfants s’amuser, et ce que disent les mères aux bébés.” En analyse, il faut entendre ce que les gens vous disent mot à mot ; si par exemple un enfant vous dit : “Moi maman faire telle chose”, c’est “Moi maman faire telle chose” qu’il faut entendre, et ce n’est pas “Moi, je vais faire telle chose pour maman”. C’est : “Moi, qui suis moitié maman moitié moi.” Dans le faire à l’infinitif, il n’y a pas de “je”. Donc c’est hors temps, hors espace de chacun puisque c’est fusionnel, et c’est ça le langage qu’il faut avoir écouté pour comprendre où se trouve l’enfant dans ce cas, dans son désir. Je prends cet exemple-là, mais tout le temps il y a soi-disant faute de syntaxe, les gens écrivent autrement. Un mot, c’est toute une phrase pour un enfant, mais nous ne savons pas laquelle, donc il faut la décoder à la fois d’après son comportement et les phrases qui suivent. Il faut écouter. Un psychanalyste doit écouter ce qui est dit. »

57Enfin, je voudrais vous dire un mot du travail de Françoise Dolto à l’hôpital Trousseau. Pendant des années et des années, Françoise Dolto a fait une consultation de psychanalyse d’enfants dans cet hôpital avec l’assistance de sept ou huit psychanalystes en formation, présents aux séances. Je crois que c’est la seule qui ait eu un tel culot et aussi un tel talent.

58Examinons de plus près le dispositif, parce que c’est ça, au fond, qui rend compte réellement de la portée de la chose. C’est qu’il n’y avait pas seulement la pièce où Françoise Dolto faisait ses analyses, il y avait la salle d’attente où officiait madame Arlette, la surveillante, qui évidemment, pour faire une chose pareille, avait fait un transfert faramineux sur Françoise Dolto. Et donc, quand le gamin arrivait dans le bureau où nous nous trouvions, il s’était passé déjà beaucoup de choses dans la salle d’attente. Or, on ne considérait pas ça comme hors l’analyse de l’enfant. Il s’y passait beaucoup de choses, et quand quelque chose de signifiant pour la séance de l’enfant se produisait, immanquablement madame Arlette avertissait madame Dolto de ce qui s’était passé dans la salle d’attente. Première partie du dispositif.

59Pourquoi la présence de ces nigauds, enfin de ces bébés-psychanalystes, plantés là, ne gênait-elle pas les enfants ? Pour plusieurs raisons. D’abord à cause de la personnalité de Françoise Dolto et de sa rigueur analytique. Quand elle était là, elle était incroyable : massive, ancrée à son bureau. Dès que l’enfant entrait, véritablement, il était capté par Françoise Dolto. Il y avait véritablement quelque chose qui se passait entre eux. Or, qu’est-ce qu’il captait, lui, le gamin ? Il captait notre transfert sur Dolto. C’est-à-dire que nous qui étions là, nous étions aussi dans le transfert avec Françoise Dolto. C’est-à-dire que tout, à la consultation Trousseau, convergeait dans un transfert sur Françoise Dolto. Résumé en langue lacanienne : pas d’Autre de l’Autre.

60Mais plus loin – et là je reviens sur quelque chose que j’ai voulu faire ressortir tout à l’heure, qui sont les deux branches de l’angle où se trouvait Dolto, que nous retrouvons à toutes les strates, et notamment cette non-complaisance absolue, assez difficile à assumer puisque à la fois il lui fallait s’identifier au point le plus régressé où se trouvait l’enfant – donc aller le chercher là –, mais en même temps faire le trajet de l’en sortir. Or, je crois que c’est à cela que lui servaient les assistants, ses collègues psychanalystes, puisqu’elle les prenait – aussi bébés-analystes étaient-ils – pour ses collègues, et qu’il y avait un transfert d’elle vis-à-vis de ceux qui assistaient. Je crois que par ce double transfert de Dolto, sur l’enfant psychosé, ou extrêmement régressé, et sur les assistants, il y avait la possibilité de quelque chose qui lui laissait une certaine labilité psychique, qui lui donnait son espace respiratoire pour être analyste.

61Donc, nous avons ces deux strates nécessaires, l’exigence de la castration symboligène, et la nécessité de communiquer et de s’identifier à l’enfant pré- ou pas verbal. Donc, en quelque sorte, deux strates nécessaires entre lesquelles elle se tenait.

62J’ajouterai encore, pour compléter le dispositif, qu’un des assistants, à chaque fois, était chargé de faire ce qu’elle recommandait de faire au square, c’est-à-dire que quelqu’un devait tout noter mot pour mot : les onomatopées, absolument tout ce qui se disait et tout ce qui se montrait. Elle-même était tout le temps en train de griffonner, de noter. Elle disait qu’elle avait besoin d’occuper ses mains pour penser. Quand j’étais gamin, un jour, dans la rue, j’ai vu une médium supposée lire les plaques d’immatriculation des voitures qui passent ou des choses comme ça. Ce qui m’avait fasciné, c’est qu’elle avait une espèce de tissu sous lequel ses mains bougeaient sans cesse – elle avait peut-être un talkie-walkie, je n’en sais rien, mais ce n’est pas du tout cela ce que j’ai retenu. Ce que j’ai retenu, c’est qu’elle faisait sans cesse bouger ses mains comme si elles avaient été court-circuitées de son espace psychique. Et Dolto disait : moi, j’ai besoin que mes mains soient tout le temps en mouvement, ou j’ai besoin de noter pour libérer mon oreille analytique, pour libérer mon écoute.

63Une des toutes premières affirmations de Freud, c’est que nos désirs les plus puissants sont nos désirs d’enfant. Cette primauté de l’enfance, Françoise Dolto l’a poussée plus loin que quiconque, jusqu’à épouser ses causes. (Je vous ai lu des extraits de La Cause des adolescents, mais bien évidemment, avant, il y a eu La Cause des enfants.) Et elle l’a fait en restaurant la force de l’avancée freudienne, ce qui a eu pour conséquence de modifier la notion même d’enfant pour nous. Infantile, c’était une sorte d’injure. Mais pour Françoise Dolto, l’enfant est sujet et en tant que sujet, pour elle, fondamentalement orienté dans la voie de la maturation. En quelque sorte, pour Dolto, son désir est spontanément progressiste si les adultes ne viennent pas l’entraver ou le pervertir. Et lorsque le terme « infantile », si souvent utilisé dans notre langue comme une injure, est utilisé comme une injure, c’est-à-dire synonyme de régression, il me semble que du coup c’est une vision péjorative de l’enfant comme irresponsable qui témoigne de la névrose de celui qui profère cette injure. Autrement dit, cela témoigne que prévaut dans la langue parlée une conception névrotique et névrosante de l’enfant chez les adultes.

64C’est pourquoi – et ce sera le dernier point, ou l’avant-dernier que je voudrais développer –, pour Françoise Dolto, la psychanalyse d’enfants débouche forcément, pour être réellement conséquente, sur une théorie de la prévention des troubles névrotiques, axée principalement sur l’hypothèse qu’il faut traiter socialement ce qui vient de la part des adultes perturber l’évolution de l’enfant. Et donc, à côté de la cure où se joue principalement un travail avec l’enfant (dans le champ clos de la cure, et c’est sa dynamique, on va travailler sur la part de jouissance régressive qui empêche cet enfant de métaboliser les traumas qu’il a subis dans son entourage), pour Françoise Dolto, cette théorie était absolument indissociable d’un militantisme – appelons les choses par leur nom – pour que socialement soient évités un certain nombre de traumatismes. Et c’est pourquoi elle a épousé la cause des enfants, c’est pourquoi elle a fait ce qu’elle a fait dans les médias, c’est pourquoi elle a publié les livres qu’elle a publiés. Elle a milité pour leur autonomie.

65Voilà ce qu’elle propose – ni plus ni moins : Propositions de réformes et amendements de la législation actuelle. Vous voyez qu’on n’est plus dans la cure ; c’est la législation qu’elle propose de réformer. Il est incontestable que ça lui venait de son expérience et du fait qu’il fallait aussi que le travail de la cure soit socialement soutenu. Elle a fait plusieurs propositions – je ne vous les lirai pas toutes : « L’instruction obligatoire jusqu’à 16 ans serait remplacée par l’obligation d’apprendre à lire et écrire et l’autorisation d’étudier dans le secteur public sans limitation d’âge. » « L’internat pour tous serait assuré par la mise en place d’un système d’hôtellerie élémentaire, installé dans les bâtiments scolaires. Chaque école aurait deux salles aménagées dans les combles avec un point d’eau. » « À partir de 11 ans, les élèves des collèges iraient avec un professeur de langues vivantes passer un trimestre dans un établissement anglais, allemand, italien ou espagnol. » « Les tuc seraient proposés aux adolescents qui ne fréquentent plus l’école à partir de 14 ans. L’âge de la majorité serait abaissé à 16 ans au moins pour les garçons, 15 ans au moins pour les filles. » « Les mineurs délinquants ne seraient plus condamnés à la vie cacérale. »

66Est-ce que c’est discutable ? Je crois que oui. Vous savez qu’on lui a énormément reproché ce qu’elle a fait dans les médias. C’est vrai que ça a prévalu pour autant de recettes pédagogiques. Je crois que si l’on avait eu l’oreille un peu plus fine, on se serait rendu compte que c’était bien difficile en fait d’en faire des recettes pédagogiques, parce que les conseils pédagogiques étaient parfois contradictoires sur les ondes d’un coup de téléphone à l’autre. Il s’agissait plutôt d’un savoir produit dans le transfert ; une interprétation, mais pas une recette pédagogique. On a dit aussi que c’était une évangélisation. C’est vrai, mais en fait, ce n’est rien de tout cela si on ne la copie pas, c’est-à-dire si l’on reste psychanalyste, c’est-à-dire si l’on s’en inspire.

67Je voudrais aborder enfin le point de ce que seraient nos tâches actuelles et comment Dolto pourrait nous aider dans l’urgence de savoir ce qu’est le corps humain. Et l’on sait encore moins ce que c’est le corps aujourd’hui, le corps de notre modernité, ce corps qui est en train d’advenir. On a affaire aujourd’hui à ce que j’appellerai non pas « le corps », mais des états de corps. Ces états de corps nous disent quelque chose de nouveau sur notre corps, sur ce que c’est que le corps. C’est une chose impossible à savoir, ce que c’est que le corps. Où en trouvons-nous des témoignages ? Nous les trouvons dans les arts. Picasso, par exemple. Qu’est-ce que Picasso nous dit de ce que c’est qu’une main ? Rappelez-vous les mains chez Picasso : comme inachevées, imprécises, pas tout à fait différenciées ; ce ne sont pas pour autant des moignons, ce ne sont pas des trognons, mais ce sont des mains caressantes, ce sont des mains érotiques, ce sont des mains qui ne blessent pas, ce sont des mains qui ne commandent pas une direction donnée, ce n’est pas l’index tendu de la direction, voire de la direction de conscience, etc. De quel corps psychique nous parle la peinture de Picasso ? De quel corps nous parlent les chorégraphies modernes ? De quel corps nous parle la musique contemporaine ? Là encore, c’est un état de corps ahurissant, puisqu’il ne s’agit même plus de la limite entre le son et la note, mais de la racine où se trouve la barre entre la note et le bruit. De quel état de corps et de quel état de corps dit psychotique, si on veut – ça ne me gêne pas qu’on le dise psychotique –, ça nous parle ? Où se trouve le discours qui permettrait de parler et de penser cela en tant que discours, pas en tant qu’œuvre d’art ? Je pense que si la psychanalyse rate ça, elle rate sa tâche historique. Autrement dit : que serait aujourd’hui une théorie moderne de la sublimation ?

68Je pense que ce que nous apporte Françoise Dolto, avec cette dynamique du corps-sujet et cette image du corps non imaginaire, conjointe avec ce que Lacan, lui, a apporté au niveau des nœuds borroméens, va peut-être nous permettre de penser ce qu’est le corps aujourd’hui. À l’appui de cette hypothèse, Lacan, en 1967 – c’est une citation importante – disait : « Nous devons produire enfin ce qui a été articulé trop vite, qui est le rapport fondamental du sujet ainsi constitué avec le corps. » Qu’est-ce qu’il appelle là le « sujet ainsi constitué » ? C’est le rappel que l’articulation subjective s’effectue dans le signifiant. Et il rajoute la phrase suivante : « C’est-à-dire que symbolisme veut toujours dire enfin symbolisme corporel, ceci à quoi j’arrive a dû être pendant des années écarté par moi… » Autrement dit, en 1967, Lacan annonce qu’il a dû écarter ceci, qui est une sorte d’évidence : que symbolisme veut toujours dire symbolisme corporel, pour qu’on ne déconne pas trop ; il aura fallu auparavant marteler que l’articulation subjective s’effectue dans le signifiant. Et c’est seulement une fois cet arrimage théorique assuré, qu’on peut enfin s’intéresser et penser ce que c’est que ce symbolisme corporel. Dans le même séminaire, la même année, il dira : « À la fin des fins, le grand Autre, c’est le corps. »
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

Extraits de 'LE PETIT". Nicole Dubreuil
après lecture d'un patient des propos de Françoise Dolto sur l'inceste.


" Elle repose les feuillets.
— Vous avez tout relu ?
— Oui.
— Et vous en pensez quoi ?
Elle garde le silence.
— J’avais cinq ans quand mon père a commencé à me violer.
Elle ne dit rien.
Il se lève, lui reprend vivement les feuillets :
— N'en déplaise à Dolto, avec sa queue devant le salaud est pire que la bête qui la porte derrière, quand il viole, qu'il torture, alcoolisé ou non c'est le même, celui qui nie et celui qui l'a fait, juste de la barbarie, la force dans les bras et ce qu'il faut entre les jambes ! Oui, c’est bien dommage ce qui se passe, et quand elle appelle ça de simples dérapages dans la vie imaginaire des pédos-criminels, quand sans la moindre humanité, sans un pardon à demander auprès de l'enfant martyr dont le seul but était celui d'être aimé et son seul tort d'exister, quand elle le nomme complice et responsable des tortures que le violeur lui inflige, qu'elle assure que s'il survit c'est qu'il y a trouvé du suffisant pour y prendre son pied, excusez-moi, mais c'est... c'est...

***
— Qui serait assez niais pour penser qu'une psy de son envergure, qui accordait une si grande importance à la parole dans la construction de l'image de soi chez l'enfant, aurait ignoré les stades de son développement psychosexuel ? Pourquoi le tiendrait-elle responsable de son ignorance pour les déviances propres à la sexualité adulte ? Je veux bien admettre que sortis de leur contexte ses propos ont été manipulés, qu'on y a volontairement confondu conscient et inconscient, mais quand elle dit que le bébé est une personne, et que par ailleurs elle considère le viol hétéro et homosexuel comme un crime, en y occultant l'inceste et la pédophilie, c'est un contresens, une aberration, il y a autre chose !
Il revient vers elle :
— Autre chose qu'un soi-disant épisode sénile, un relent de complotisme ou un épisode délirant ! On raconte que sa sœur aînée qui est morte à 16 ans, était une enfant que le grand père aurait eu en couchant avec sa propre fille, cette fille qui était sa mère, victime d'inceste, sa mère à elle qui lui en voulait de ne pas être morte à la place de sa préférée ! Je crois que c'est contre la cruauté et l'aveuglement de sa mère qu'elle s'est investie dans la cause des enfants, c'est pour se dégager de son traumatisme qu'elle leur a donné la parole, c'est pour survivre qu'elle les a rendus responsables ! Alors pour les autres, les abusés, elle s'est vengée, c'est normal qu'elle ait du mépris, c'est bien fait pour eux, il fallait qu'elle protège son grand-père qui n'avait plus sa conscience, la prochaine fois ils feront attention !
— Résumons, dit-elle, vous avancez que rejetée par sa mère, Françoise Dolto ne pouvait y survivre qu'en humanisant le grand-père pédophile.
— C'est ça ! Et ce qui est choquant pour une psy, c'est que dans ses interviews elle en parle sans le savoir, sans pouvoir se l'expliquer.
— Sans pouvoir se l'expliquer, tout comme vous, qui en interprétant son traumatisme ne pouvez que lui prêter le vôtre. C'est à dire, ne pas me regarder dans les yeux, ne pas être à la merci d'un éventuel agresseur, fuir son regard abyssal, désaffecté, ce trou de l’épouvante.
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

L'OMBRE

Pour C.G. Jung, l’ombre représente ce que nous avons refoulé dans l’inconscient par crainte d’être rejetés par les personnes importantes de notre vie : parents, éducateurs, et d’une façon générale, la communauté dans laquelle nous avons grandi. Ces parties reléguées de nous-mêmes peuvent paraitre redoutables ou honteuses. Elles se manifestent souvent sous forme de jugements, rejets, peurs ou projections, et sont à la base des préjugés sociaux et moraux. Pourtant elles sont riches en potentiel si nous apprenons à réunir et pacifier des aspects de soi qui semblent contradictoires. La connaissance du concept de l’ombre est un outil d’acceptation qui permet de consolider la confiance en soi, de pratiquer l’ouverture, la bienveillance et la créativité, bases de saines relations. C’est aussi un outil majeur pour comprendre la dynamique de beaucoup de conflits familiaux et en entreprise.

Tout est fondamentalement bon en nous !
« L’ombre est quelque chose d’inférieur, de primitif, d’inadapté et de malencontreux, mais non d’absolument mauvais. »
« Il n’y a pas de lumière sans ombre et pas de totalité psychique sans imperfection. La vie nécessite pour son épanouissement non pas de la perfection, mais de la plénitude. Sans imperfection, il n’y a ni progression ni ascension. »
« La clarté ne nait pas de ce qu’on imagine le clair, mais de ce qu’on prend conscience de l’obscur. »
C.G. Jung — L’Âme et la vie, LGF, Livre de Poche, 1995

C.G. Jung fait allusion à deux polarités qui nous constituent : l’ombre et la lumière.
Il nous dit aussi que « Sans émotion, il est impossible de transformer les ténèbres en lumière et l’apathie en mouvement. »

« Mettre l’homme en face de son ombre cela veut dire aussi lui montrer sa lumière. Il sait que l’ombre et la lumière font le monde… S’il voit en même temps son ombre et sa lumière, il se voit des deux côtés et ainsi il accède à son milieu. »
C.G Jung - Psychologie de l’Inconscient, Éd. Livre de Poche, 8e éd., p. 224.

Le rôle de l'Ombre
Dans la psychologie de Jung, l’Ombre joue un rôle capital. Elle représente tout ce que nous cachons aux autres et à nous-mêmes pour ressembler à un « modèle idéal ». C’est en fait notre partie obscure, le pôle complémentaire, mais négatif, de notre complexe du Moi. Au cours de notre vie, cette zone ignorée reçoit le dépôt de plus en plus épais de nos actes passés, du refoulement de nos désirs illicites, de tout ce que nous avons entrepris et raté, dépôt alimentant notre culpabilité et notre amertume. Plus nous ignorons volontairement cette lie, plus elle devient noire et épaisse. Ce dépôt ne représente pas forcément le Mal en nous, mais plutôt tout ce qui est primitif, aveugle, inadapté. Il alimente notre peur. En fait, l’Ombre incarne notre inconscient personnel. Mais, à cause de ses racines archétypiques, elle peut figurer aussi bien le Mal absolu, surtout sur le plan collectif. C’est alors que surgit le Diable entouré de ses créatures maléfiques.

« Les côtés malaimés de nous-mêmes que nous tentons en vain d’éliminer de nos vies se projettent sur les autres, et nous forcent à les reconnaitre. » Jean Monbourquette

La plupart du temps nous projetons notre ombre sur autrui. C’est lui qui a toujours tort. Cette projection de toutes nos négativités alimente nos aversions incompréhensibles et nos haines viscérales. Mais elle est aussi un moyen de voir clair en nous, à condition de prendre conscience de cette projection.

« De deux choses l’une, nous connaissons notre ombre ou ne la connaissons pas ; dans ce dernier cas, il arrive souvent que nous ayons un ennemi personnel sur lequel nous projetons notre Ombre dont nous le chargeons gratuitement, et qui à nos yeux, la porte comme si elle était sienne, et auquel en incombe l’entière responsabilité ; c’est notre bête noire, que nous vilipendons et à laquelle nous reprochons tous les défauts, toutes les noirceurs et tous les vices qui nous appartiennent en propre ! Nous devrions endosser une bonne part des reproches dont nous accablons autrui ! Au lieu de cela, nous agissons comme s’il nous était possible, ainsi, de nous libérer de notre Ombre ; c’est l’éternelle histoire de la paille et de la poutre. »
C.G.Jung — L’homme à la découverte de son âme, Éd. Mont-Blanc, 4e éd., p. 380.

Comment affronter cette inconnue si puissante ? Nous nous rendrons vite compte qu’elle possède une énergie qui nous dépasse ; la forcer nous fait risquer le pire. Il faut plutôt tenter de dialoguer avec elle. Sa réponse survient un jour, toute seule, évidente, d’une façon imprévisible. Nous devons ainsi dépasser le conflit, plutôt que le résoudre. C’est à ce prix que nous intègrerons notre Ombre, sans répercussion fâcheuse. Si nous refusons ce marché — et la tentation est grande —, l’Ombre régentera en secret notre existence et nous tendra des pièges, peut-être mortels (accidents). C’est le cas pour l’homme qui a perdu son ombre, celui qui croit tout savoir de lui-même et devient la victime de son outrecuidance.

Seul, le Soi peut transcender le problème de l’Ombre. Car celle-ci communique avec les grands archétypes, l’Anima (âme féminine de l’homme) et l’animus (pôle masculin de la femme). L’Ombre a donc une fonction de relation qui n’est pas entièrement négative ; et même une fécondité créatrice. Le processus psychologique consiste à prendre conscience de son Ombre et à l’intégrer à sa conscience, au-delà de tous les préjugés moraux et sociaux qui l’entachent.


Didier BRESSAN, Psychopraticien Certifié® FF2P
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

Re: Je n'arrive pas à enfiler de préservatifs
Message par Antony » 20 nov. 2022, 12:49

Bonjour,
Je présume que vous avez un pénis en forme de bouteille. On peut simplifier a forme à 3 formes de base.
Le type droit où la circonférence est la même à l'extrèmité distale qu'à l'extrémité proximale.
Le type "arciforme" (en forme de proue de navire)
le type bouteille de "Bordeaux" où la circonférence distale et nettement inférieure à la circonférence proximale. Ce qui expliquerait le problème des préservatifs qui ne couvre qu'à moitié. Ceci expliquerait aussi ce qui est ou s'apparente à un phimosis.
Il faut aller plus loin dans la connaissance de la jonction muco-cutannée du prépuce (muqueuse à l'intrieur et peau à l'extérieure d'où la jonction cuco-cutannée). Il convient aussi de savoir localiser les corpuscules (récepteurs) de Meisner, etc.....
Il est important de connaître tout cela pour ne pas faire une intervention inutile dont le résultat sera pire que la situation actuelle.
https://www.droitaucorps.com/prepuce-ce ... BIUjP1v0Pc
Sexologue bénévole à la retraite
N'hésitez pas à m'envoyer un message en privé MP ou par mail : antony.sxlg@gmail.com
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

Contact : Contacter Dubreuil
Re: Ma dépendance affective me fait sombrer.
Message par Dubreuil » 02 janv. 2022, 01:18

Cette femme est un être humain ordinaire qui n'a de pouvoir que celui que vous lui donnez.
Vous semblez considérer qu'elle vous a détruit simplement parce qu'elle a décidé de ne plus vous donner d'importance, pourtant on ne raye pas de sa vie l'existence d'une personne avec qui on a vécu. Il y a eu de sa part certainement d'innombrables petits faits, de rancoeurs et déceptions cachées, de silences et de lâchetés pour en arriver à ce ras-le-bol. Et vous aviez besoin de votre côté de vous leurrer sur l'existence d'un couple en général, alors que chacun est seul en lui et doit évoluer sans dépendance à autrui, par ses propres moyens. Ce sont les autres qui nomment le couple, alors qu'en réalité, ce sera toujours deux êtres distincts qui tentent d'avoir ensemble la même idée de leur propre épanouissement affectif et sexuel. C'est un leurre. Tout comme c'est un leurre et unegrave erreur de se mettre au service du bonheur de l'autre, à plus forte raison quand on ne possède pas soi-même ce que l'on veut donner.
L'amour est fait de désirs inconscients, dont celui où on croit que l'autre va "réparer" ce que l'on a pas reçu de la part de notre propre père ou mère. On lui demande inconsciemment qu'il nous apporte ce qui nous a manqué.
Vivre, homme et femme ensemble, si différents physiquement et mentalement est très compliqué, ce peut même devenir une hérésie, passées les périodes plus ou moins euphoriques de la rencontre.
Qui a dit que l'homme étaient faits pour vivre ensemble ? Pour procréer, certes, mais ensuite ?
La réflexion consiste à faire une liste de ce qu'il vous reproche, et à considérer que C'EST A LUI qu'il adresse tous ces agacements et ces déceptions. Vous êtes devenue son bouc émissaire simplement parce qu'il a quelque chose à se reprocher qu'il ne veut ou ne peut assumer. Partir ainsi est le résultat d'un manque de dialogue quia commencé bien avant le départ. Il est parti d'une façon théâtrale, en dignité offensée, en vous nommant responsable de tout ce qu'il est incapable de gérer. Il souhaite, inconsciemment ou pas, vous rendre responsable de l'échec de l'idée qu'il avait eu d'un couple idéalisé.
Elle vous fait culpabiliser, alors que vous êtes l'un et l'autre des êtres libres de votre corps et de vos pensées.
Comme dans toutes les rencontres, de votre côté pour être aimée vous lui avez beaucoup donné, et vous l'avez ainsi " endetté ", il s'est senti redevable et en incapacité de vous rendre la pareille. Les grandes théories fumeuses de "mais c'est normal, on partage tout, etc.. " ne tiennent pas la route. Si la vigilance baisse la garde, si on s'oublie pour l'autre, si on se nie, au bout du compte c'est un fiasco assuré.
Il vous a éffacé de son existence, dites-vous, c'est douloureux maintenant, mais ce que vous avez vécu ensemble est acquis autant pour l'un que pour l'autre. Vous y avez aussi trouvé vos intérêts, vos bonheurs.
Voilà, ça s'arrête, et alors ? Votre vie ne se résume pas à cette expérience de vie ! Maintenant, considérez que vous êtes en mesure de faire, dire, devenir ce que vous avez abandonné VOLONTAIREMENT pour elle.
Vous pouvez en être fier et laisser votre déception, vos ressentiments, votre dépit ou humiliation au vestiaire ! Elle ne vous a rien pris, vous n'êtes pas détruit, au fond de vous vous êtes intacte, tout ce que vous avez vécu vous l'avez voulu, puisque supporté. Prenez le meilleur pour avancer, et partez dignement, ne vous laissez pas malmener par le doute et les ressentiments, c'est fait. Donc, avancez..
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Re: Urgent, c'est le tournant de ma vie

Message par Dubreuil »

L'ENFANT SURDOUE

Pour qualifier un enfant de surdoué, les auteurs tiennent compte à la fois d’un excellent QI de base, révélé par les tests d’intelligence généralistes, et d’un talent créatif dans un ou plusieurs domaines, point difficile à appréhender. Il semble en effet réducteur de définir un enfant surdoué à la seule mesure du QI.

Certains auteurs font entrer 3 composantes essentielles dans le « surdon » : l’aptitude intellectuelle élevée, la créativité et l’engagement. La créativité désigne une combinaison de caractéristiques comme la flexibilité, l'originalité et la curiosité, tandis que l’engagement consiste en une forte motivation dirigée vers un domaine de connaissance particulier. D’après l’auteur Renzulli, c’est la conjonction de ces 3 composantes qui est indispensable pour réaliser des productions intellectuelles d’exception ou de génie. Les conditions environnementales comme le climat familial ou les événements de vie critiques jouent évidemment un rôle supplémentaire in fine.


Qui sont-ils ?
On distingue souvent les enfants dit « bien doués », dont le quotient intellectuel est supérieur à 130, et les enfants surdoués, dont le quotient intellectuel dépasse les 140 et qui représenterait 0,4 % de la population.

On parle également d’individu à « haut potentiel intellectuel (HPI) » pour des enfants dont le QI est supérieur à 130. Cela concernerait 2,1 % de la population, soit 450 000 enfants en France.

On rapporte davantage d’enfants surdoués masculins que féminins, ainsi qu’une surreprésentation de gauchers.

Les caractéristiques des enfants surdoués
- La réussite scolaire est courante, mais pas systématique.

- Ils apprennent généralement à lire avant les autres et souvent même avant d’être scolarisé (1 enfant surdoué sur 2).

- Ils se font remarquer par leur goût immodéré pour les connaissances, tout comme la curiosité insatiable, la mémoire, la rapidité de compréhension, la richesse du vocabulaire et leur fascination à l’égard des atlas et des encyclopédies.

- Ils n’ont presque jamais besoin d’être stimulés, dévorent les livres sans orientation préalable des parents.

- Les études montrent que le travail scolaire exigé de ces enfants dans les classes traditionnelles est nettement en-dessous de leurs possibilités. Pour l’auteur J.C. Terrassier, la corrélation entre degré d’instruction et temps passé à l’école s’avère même presque nulle.

- Plus leur QI est élevé, et plus leur développement cognitif est hétérogène.

- A l’âge adulte, ils maintiennent une supériorité d’ensemble sur divers plans.

- Ils se questionnent sur le temps qui passe, se montrent souvent anxieux et ont besoin d’entourage, d’étayage affectif.

- On rencontre des manifestations d’ordre obsessionnel chez 1 enfant surdoué sur 4.

- Pour Jeanne Siaud-Facchin, il ne s’agit pas d’enfants plus intelligents que les autres, mais qui pensent différemment d’un point de vue qualitatif. Un tel mode de pensée se caractériserait par « un développement de la pensée en arborescence qui active simultanément plusieurs canaux de réflexion et qui peut permettre un puissant déploiement de la pensée par de multiples associations d’idées. »

- On leur reconnaît une grande capacité d’empathie, ainsi qu’une hypersensibilité émotionnelle pouvant se traduire par une susceptibilité importante.

- Il est très fréquent que les enfants surdoués développent des troubles de l’apprentissage comme la dyslexie, la dyscalculie ou la dyspraxie…

Que deviennent les enfants surdoués ?
Contrairement à ce que pensaient les chercheurs au début du XXème siècle, le devenir des enfants surdoués n’est pas toujours rose.

Une partie d’entre eux serait même en proie à de grandes souffrances. Le décalage entre la maturité du Moi et l’immaturité effective, qu’on appelle dyssynchronie, entraîne des frustrations, des retraits dépressifs, voire des passages à l’acte. En clair, leur pensée trop précoce se heurterait à une maturation affective normale suivant le développement chronologique. Toutes ces années durant lesquelles on s’apprête à lui demander de ne pas fonctionner à son rythme, risque de détériorer ses attitudes sociales et d’inhiber ses capacités intellectuelles.

Trois auteurs Terman, F. Precelle et P. Debroux ont constaté qu’ils entretenaient souvent un rapport conflictuel à l’autorité et manifestent parfois des attitudes de mépris, voire de puissance.

Debay et Delaigue, 2 psychologues de terrain, corroborent ces éléments et ajoutent que, plus tard, les enfants surdoués présentent une affectivité fragile et carencée, et n’atteignent pas le niveau de réussite scolaire qu’on leur promettait (1 quart d’entre d’eux n’obtenant pas de bons résultats du tout).
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
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